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La réalité agricole à l’épreuve des injonctions politiques

Jean-Alain Divanach, président de la FDSEA 29.

Quel regard les pères fondateurs de la politique agricole commune (PAC) porteraient-ils sur les stratégies agricoles européennes actuelles ? Eux qui, il y a soixante ans, ont pensé une PAC nourricière pour les citoyens, en quantité et en qualité ; une Europe auto-suffisante à l’abri de la menace de l’arme alimentaire ! Eux qui ont misé sur l’extraordinaire potentiel de production des agriculteurs, en le mettant au service de l’indépendance alimentaire de l’Europe. La logique qui prévalait alors était d’une réelle évidence : du champ à l’assiette.
On essaie de nous fait croire que le pacte vert, ou green deal, renouvellerait cette logique. Certainement pas ! La réalité du green deal est totalement inverse : désormais, les politiques agricoles sont déterminées à partir de l’assiette… pour ruisseler jusqu’au champ ! Voilà comment les agriculteurs se voient imposer des équations impossibles et dogmatiques autour de la réduction des produits phytosanitaires et des engrais, de l’augmentation des surfaces en agriculture biologique… Les politiques exigent des agriculteurs qu’ils s’adaptent sans cesse, à marche forcée, sans jamais se demander non seulement ce qui est réalisable, mais aussi si les marchés seront au rendez-vous.
Ces choix purement politiques ont d’ores et déjà des conséquences concrètes. Des producteurs de lait ou d’œufs bios font l’amère expérience de prix proches du conventionnel, quand les débouchés ne font pas défaut. Avec de telles politiques d’injonctions du consommateur à l’agriculteur, le risque majeur est celui de l’insécurité alimentaire. Nous sommes en droit de nous interroger : se passer d’agriculteurs relève-t-il d’un choix purement politique, en se disant que de toute façon des industriels seront au rendez-vous pour mettre dans l’assiette du consommateur du steak végétal ou de la viande cellulaire ?
Encore faudra-t-il que le consommateur ait les moyens de remplir son caddie ! La problématique n’est manifestement pas qu’agricole à lire Carlos Tavares, patron de Stellantis. Ce dernier dénonce le choix de l’électrification des véhicules à marche forcée par les politiques, contre l’avis de l’industrie : "Faut-il des véhicules 100 % électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux États de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner ?". On pourrait largement remplacer les "véhicules électriques" par des "produits agricoles sans engrais et sans pesticides" ! Au moment où la France prend la présidence de l’Union européenne, notre ministre de l’Agriculture a une occasion majeure d’inscrire les politiques agricoles européennes dans le réalisme de nos exploitations, dans une vraie logique de la ferme à la fourchette salutaire pour tous. Le syndicalisme défend sans relâche la rentabilité des exploitations agricole, quel que soit leur mode de production. Nous avons en parallèle le devoir de rester lucides sur la réalité des marchés et de ne pas nous laisser endormir par ces injonctions politiques démagogiques qui conduiront l’agriculture bretonne droit dans le mur.

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