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2021 : des moissons qui n'en finissent pas

Une météo humide et un été noir pour les entrepreneurs de travaux agricoles. Le retour du beau temps devrait permettre d'achever les 500 hectares à Hénansal (22) encore à battre au 20 août.
© ETA EDT Robillard

"C'est une année noire pour les entreprises"

La météo estivale met à mal le moral des entrepreneurs de travaux agricoles qui gèrent une situation compliquée. Un été noir et des moissons laborieuses, il est grand temps que le beau temps s'installe pour boucler les chantiers.

"On galère", "c'est la m ...". Chez les entrepreneurs de travaux agricoles, la lassitude et la colère sont à leur paroxysme. La météo désastreuse de cet été 2021 a grandement compliqué les travaux qui n'étaient pas terminés au 20 août. À l'ETA EDT Robillard à Hénansal dans les Côtes d'Armor, ce sont 500 ha qu'il restait à boucler la semaine dernière, un quart de la surface des 1 500 ha de blé à moissonner. Du jamais vu ! "D'habitude, nous terminons les moissons au plus tard le 7-8 août, jamais nous n'avons connu une telle situation, c'est énorme", décrit Nicolas Robillard. Il ne reste plus que quelques jours cependant. "Je pense qu'il reste 3 jours et demi, 80 clients à servir", annonce-t-il. Mais face aux prévisions qui s'annoncent meilleures, il reste prudent et sceptique. "Je ne crois plus aux prévisions météo !"

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Des problèmes qui s'enchaînent

Des parcelles sales, un taux d'humidité élevé, le planning des clients chamboulé et l'emploi du temps du personnel à gérer, c'est la galère. "Nous avons des parcelles sales, remplies de liseron. De plus, les coopératives ne veulent pas modifier le seuil d'humidité. Il faudrait relever le taux d'humidité au moins à 17,5 %. Nous sommes capables de battre à 18 % alors que les coopératives demandent un maximum de 16 %. Elles ne jouent pas le jeu, cela ne nous aide pas !", fulmine Nicolas Robillard. De plus, l'entrepreneur conseille à ses clients d'utiliser une "Mini-Batt", un outil portatif, pour contrôler le taux d’humidité du grain rapidement avant de déplacer la machine. Mais cette méthode n'est pas beaucoup employée.
En bout de chaîne, les patrons des ETA se sentent esseulés et impuissants face aux règles fixées par les coopératives et celles de l'administration également qui impose "la date butoir des semis de couverts végétaux au 26 août alors que l'on n'a pas fini de battre ! Le naturel et le vivant ne se commandent pas, il n'y a pas de bon sens dans ce pays", peste-t-il.

Emmanuelle Le Corre

 

Moisson retardée, qualité écornée

Avant qu’il ne se décide enfin à se remettre au beau, le mauvais temps de ces dernières semaines a retardé les chantiers de moisson. Un vrai casse-tête pour les agriculteurs, qui voient la qualité du grain se dégrader et ont parfois du mal à récolter la paille.

"La moisson ? Cette année, on l’a volée !, image Pierre Sinquin, agriculteur à Scaër (29). On a fini le 18 août, entre les averses, avec un rendement à 70 q/ha, à 17,5 d’humidité".
À quelques kilomètres de là, en plein cœur du pays bigouden, David Kerveillant ronge son frein. "Il nous reste encore 60 ha à battre alors que d’habitude, on a fini au 5-6 août au plus tard". En fin de semaine dernière, alors que le temps se maintenait désespérément au maussade, l’entrepreneur de travaux agricoles et producteur de porcs de Plogastel Saint-Germain (29) ne voyait toujours pas la fin de la moisson. "Pourtant, avec nos deux machines, il nous suffit de trois jours de beau temps".
Et déjà, la qualité fait défaut. "Le triticale a germé. Et en blé, le taux d’humidité reste élevé, à 17 ou 18". Au vu des années climatiques compliquées qui se succèdent, il s’est équipé d’un séchoir il y a quelques temps, et ne peut que s’en féliciter. "Tous les blés récoltés ces derniers temps y passent". Mais en quelques jours seulement, le PS a perdu 10 points, passant de 76 à 66-67. Et l’alternance de pluie et de soleil a favorisé les champignons. "On voit apparaître des grains roses : les mycotoxines se développent".

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Ailleurs, la pluie n'a pas permis de rentrer la paille.

Une saison compliquée de bout en bout

De plus, la paille devient compliquée à récolter. "Elle part en poussière", constate David Kerveillant. Et certains agriculteurs n’auront d’autre solution que d’y passer le broyeur. "Dans les parcelles clairsemées, les mauvaises herbes sont reparties. On a de moins en moins de traitements et ils sont moins rémanents. Que la récolte traîne un peu et les parcelles se salissent". Et l’agriculteur de pointer le risque de départ de feu dans les hangars, une fois la paille rentrée. "Certains ont du mal à attendre qu’elle sèche avant de la presser". Une saison compliquée de bout en bout ! "Avec le Covid, on a eu des problèmes de personnel. Et du mal à trouver les pièces pour réparer nos machines".

Chantal Pape

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En fin de semaine dernière,le mauvais temps a empêché de terminer la moisson.

 

 

À la cuma la Néantaise : 10 % des moissons à finir

"Ça agace, tout le monde voudrait avoir fini". À la Cuma de Néant-Sur Yvel, à deux pas du massif de Brocéliande, au Nord-Est du département du Morbihan, on aimerait bien que les moissons soient de l’histoire ancienne.
Mais en ce début de semaine, ce n’est pas le cas. "Nous avons deux moissonneuses pour récolter les 500 ha de nos neuf adhérents. Un chauffeur de la Cuma voisine, vient en renfort mais aujourd’hui (lundi 23 août), il reste encore 50 ha à faire", détaille Jérôme Haupas, président de la Néantaise. "Cela n’avance pas, la mauvaise herbe repousse, c’est le bazar". C’était pourtant bien parti en juillet, pour l’orge et le colza. "Le colza qui n’était pas fini, ça tombait bien car ce n’était pas mûr non plus". La qualité, elle, était au rendez-vous avec "81 de poids spécifique début juillet, on a chuté a 72 maintenant. La protéine, 11,8-11,9 chez nous, n’a pas bougé". La panne de trois semaines qui aurait pu être pénalisante sur l’une des deux machines, a couru durant la période pluvieuse de fin juillet-début août.
"On a voulu redémarrer mi-août. Il restait encore plus de 200 ha de triticale et de blé. Pour les semences, il faut que ce soit bien sec avant de les remettre dans les silos…", pointe cet éleveur laitier en Gaec qui, comme beaucoup, avait posé ses vacances lors de cette dernière semaine d’août. C’était sans compter sur cette moisson qui joue les prolongations.
Dans cette zone du département du Morbihan, plutôt sèche et peu arrosée, "où c’est bien rare de voir de l’herbe à cette saison", on se console sur "une qualité dans l’ensemble correcte, les rendements sont là".
"Pour l’organisation des chantiers, cela n’a pas été simple a gérer", reconnaît Jérôme Haupas qui se projette déjà sur les ensilages. Car, dans le sud du Morbihan, ils débutent dès les derniers jours d’août, en année sèche. Cela ne sera sans doute pas le cas, "j’ai bien peur que, là aussi, il y ait du retard".

Claire Le Clève

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