Frank Guehennec, président de la FDSEA
"Arrêtons de matraquer le monde agricole"
Réglementation environnementale, Ecotaxe et organisation des filières.... Dans un entretien de rentrée, Frank Guehennec, président de la FDSEA, pointe trois dossiers essentiels pour "libérer les énergies agricoles. Il y a une volonté dans le monde agricole. Les paysans ont envie de se développer, de se moderniser, arrêtons de leur mettre des boulets aux pieds" estime t-il.

Sur-réglementation : "On a fait énormément de travail sur le dossier environnement et les résultats sont là, avec une courbe nitrates qui s’infléchit. Cela a été du volontariat avant que cela devienne du réglementaire. Avec la mise en place du 5 éme programme de la directive Nitrates, le reste de la France découvre cette réglementation mais nous sommes déjà à la pointe. Or on veut encore durcir cette réglementation pour la Bretagne. On dit ça suffit. Cela participe au découragement du monde paysan. Jean Marc Ayrault a fait des promesses au Space, nous attendons des actes. La simplification administrative ? On demande des actions maintenant. Nous avons décidé d'adopter une nouvelle stratégie. Eaux et rivières a attaqué les décrets préfectoraux sur le 4 ème programme. Aux cotés de l’État nous contre-attaquons et portons l'affaire en appel. Nous nous opposons à cette réécriture du programme que les préfets ont du mettre en œuvre suite au jugement. Ce qui est en cause, c'est le calendrier d'épandage qui nous interdirait d'épandre avant le 31 mars et après le 30 avril. C'est une mesure absurde qui ne tient pas compte de l'approche agronomique, de la minéralisation de l'azote et du besoin des plantes. Parce que nous en avons assez de subir, nous attaquons. C'est en lien à ce que nous observons au sein des Clé et des Sage où certains élus veulent aller plus loin que le réglementaire. C'est totalement improductif, ils sont en train de tuer leur économie locale.
Compétitivité : "Aujourd'hui, je le réaffirme clairement, nous nous opposons à l'Ecotaxe et allons entrer en action avec les JA. C'est un impôt supplémentaire, un vrai boulet de plus qu'on colle au pied de l'ensemble du monde agricole. Une fois mise en place, elle va se répercuter sur tous les produits. Quand un bateau arrive à Lorient etpaye une fois, nous on va passer 7 fois à la caisse, et pour les aliments, et pour le lait, et pour les cultures...On pénalise encore une fois la compétitivité de nos entreprises. Je reviens du Space qui a encore connu un record d'affluence. Dans ses allées, on y a vu la volonté du monde paysan d'être là demain, de se développer, de se moderniser. Arrêtons d'accentuer les contraintes qui pénalisent la production française. On ne doit plus parler de maintien, mais bien de développement de la production tout en respectant l'environnement. Les pouvoirs publics doivent être des facilitateurs pour libérer ces énergies agricoles..
Filières : "Avec la réforme de la PAC, les aides vont diminuer, on ne va pas se le cacher. Mais il faut que l'atterrissage se fasse en douceur. On est pleine discussion. On doit éviter que l'élevage trinque. Les fonds du 2 éme pilier doivent être orientés vers le besoin de modernisation des exploitations, c'est primordial car ce sera créateur d'emplois dans nos structures. UN atterrissage en douceur également pour nous donner le temps d'organiser les filières. Dotons nous d'outils pour réguler et éviter cette volatilité, des fonds d’investissement pour pallier aux crises, réfléchissons aux risques quand les prix ne seront pas au rendez vous. Je crois qu'à un moment donné, pour peser dans les orientations, les agriculteurs doivent mettre de l'argent au pot. Regardons ce qui se passe chez Sodiaal en matière de parts sociales... Soit on veut peser, soit on subit. Il faut aller plus loin dans l'organisation de la filière. Réfléchissons à des projets collectifs pour massifier l'offre et permettre aux paysans de peser et de moraliser la relation commerciale. Par rapport à Gad, nous avions demandé une restructuration intelligente à l'échelle du territoire breton. Règle t-on le problème de la production porcine en supprimant un abattoir ? Je mets tout le monde dans le même bateau, amont, aval... Si on veut pérenniser les emplois, arrêtons de matraquer et trouvons des solutions collectives. Pourquoi ne pas songer à une plate forme commune de marché à l'export ? Tirons les enseignements des exemples venus aussi d' ailleurs, cette volonté politique, au Danemark, en Allemagne d'une agriculture performante. L'outil de contractualisation peut être un bon outil s'il est gagnant gagnant quel que soit le maillon de la filière. Soyons optimiste pour le monde paysan, laissons le s'exprimer dans ce monde libéral. Des paysans ont envie de se développer et de répondre aux attentes industrielles. Laissez nous faire, tout en respectant l'environnement, mais arrêtez de nous mettre des boulets aux pieds"
Propos recueillis par Claire le Clève