Retrouver durablement de la compétitivité

La forte mobilisation des agriculteurs bretons cet été, à Paris le 3 septembre, à Bruxelles le 7, met au-devant de la scène ce qui couve depuis longtemps, et que les pouvoirs publics refusaient de voir : une perte de compétitivité de notre agriculture qui met à mal le positionnement de nos productions sur les marchés, une saturation et une exaspération face à la surenchère de normes, et plus encore face aux contrôles tatillons du respect de ces normes. C’est donc un désarroi de nature économique, une crise de confiance et de reconnaissance, une crise morale qui est montée s’exprimer à Paris. C’est d’ailleurs ce malaise aux multiples origines qui explique le soutien et l’accueil favorable que nous ont réservé nos concitoyens sur les routes et à la capitale. La voix des agriculteurs portait au-delà de leur propre inquiétude et de leur propre questionnement, face à un avenir incertain. C’est toute la force de cette mobilisation. Même dans une société moins agricole et plus urbaine, le malaise économique et social des paysans porte en écho des territoires éloignés et fragilisés, de la peur du décrochage dans l’indifférence générale.
Face à une situation si critique, force est de constater que ni à Paris le 3, ni à Bruxelles le 7, les mesures pour un retour immédiat à la compétitivité, une meilleure organisation des marchés, la réduction des contraintes normatives, n’étaient pas au rendez-vous. Disons-le tout net au Premier ministre, les déclarations d’amour ne sont pas des preuves d’amour. Reconnaissons que les mesures d’urgence en matière de trésorerie, d’allègement de cotisations sociales, de rééchelonnement des annuités, peuvent redonner du souffle à un certain nombre d’entreprises. Mais l’intérêt de reprendre son souffle, c’est de pouvoir reprendre la course et poursuivre son itinéraire, sans plomb dans les bottes.
C’est seulement à cette condition que nous mesurerons la fidélité aux déclarations et aux engagements : après l’urgence, ce sont des dispositions fiscales et sociales efficaces que nous attendons du législateur français dans la prochaine loi de finances, c’est une baisse significative des charges, c’est bien plus qu’une pause normative que nous attendons. Si pause il y a, elle doit servir à rebattre les cartes et à revenir aux réalités de terrain, et non pas à reculer pour mieux sauter dans six mois après les échéances électorales. Quant à l’Union européenne, il est urgent qu’elle retrouve une ambition pour son agriculture. Reconnaître le marché, ce n’est pas renoncer à l’organiser, surtout quand il s’agit d’agriculture et d’alimentation. C'est le rôle que les politiques devraient jouer à Bruxelles, au lieu de se laisser imposer le diktat de la Commission.
Aux messages d’amour, nous préférons le courage politique d’une véritable ambition française et européenne pour l’agriculture, pour les agriculteurs et la vitalité socio-économique des territoires ruraux.