Stop à l'artificialisation des terres agricoles !
Alors que l'on parle partout de densification, de redynamisation des centres bourg, que les consommateurs expriment leurs nouvelles attentes dans leur manière de consommer, les zones commerciales font encore la part belle à l'artificialisation. A l'image du projet d'implantation de Grand frais à Beaucé (35), qui a fait vivement réagir la chambre d'agriculture.

"Ce projet de zone commerciale, c'est 10 à 15 ha de terres agricoles. Auxquels il faut ajouter les 50 ha nécessaires pour la future déviation de Beaucé. Aucune étude n’a démontré qu’il fallait augmenter la surface de vente sur le territoire. Une hausse des surfaces de vente n’est pas bonne pour l’agriculture car cela engendre une baisse de prix et du gaspillage. Avant de penser à ouvrir de nouvelles zones, il faut utiliser les friches existantes (comme l’ancien Bricomarché), ou à venir, ou densifier dans les zones existantes". À l'occasion d'un point presse qui s'est tenu vendredi 19 juin à Lécousse, Florian Salmon, élu à la chambre d'agriculture, n'a eu de cesse de marteler son mécontentement devant ce projet. Et sur cette question, la chambre d'agriculture n'est pas la seule à faire entendre sa voix. La chambre de commerce et d'industrie, la chambre des métiers, la ville de Fougères, les commerçants locaux ou encore l'association La Passiflore font déjà partie du cortège des opposants.
Les ambitions personnelles ne doivent pas aller à l'encontre d'une réflexion globale.
Un non sens
Loïc Guines, président de la chambre d'agriculture d'Ille-et-Vilaine va même plus loin, rappelant sa prise de position il y a quelques années sur un projet d'implantation de Super U dans cette même zone. "Déjà à l'époque j'avais souligné que s'il s'agissait de faire venir une entreprise et de créer 300 emplois, on pouvait réfléchir... Mais là c'est un non sens ! Les ambitions personnelles ne doivent pas aller à l'encontre d'une réflexion globale sur le pays de Fougères". À travers ces propos, le président de la chambre d'agriculture vise directement Jean-Louis Lagrée, maire sortant de Beaucé, qui a signé le permis de construire le 17 mars dernier, au lendemain du premier tour des Municipales. "Il a tout fait en sous-marin sans concerter personne. Ce n’est pas une réflexion honnête d’élu !". Ancien premier adjoint, Stéphane Idlas est aujourd'hui le nouveau maire et se retrouve en première ligne dans la gestion de ce dossier.
Au delà de cet exemple, comment stopper cette course aux m2 commerciaux, qui en plus ne prend pas en compte les nouvelles attentes des consommateurs ? À l'échelle régionale, le Sraddet apporte une ligne conductrice, comme le font les SCoT à l'échelle des territoires, et les PLU au niveau local. Sur la thématique des habitations, on voit que la réflexion est avancée dans les communes, pour densifier davantage. En revanche pour les zones commerciales, il n'existe pas ou peu de contraintes. "Au nom de l'emploi, c'est difficile pour les élus de résister", note Annelyse Ferré, chargée de mission Urbanisme-Aménagement à la chambre régionale d'agriculture de Bretagne, qui prévient déjà : "Rien qu'en Ille-et-Vilaine, ce sont des centaines d'hectares qui sont à l'étude pour des projets de zones commerciales".
Reste que juridiquement, le projet de Beaucé semble difficilement attaquable. Loïc Guines et Florian Salmon en appellent aux élus locaux et à la pression de tous les opposants au projet. Un recours de la ville de Fougères a d'ores et déjà été déposé.