Une étude de l’Institut de l’élevage
De la nécessité d’une politique de l’herbe
Alors que la campagne électorale se focalise sur les enjeux environnementaux, l’Institut de l’élevage apporte sa contribution au débat dans une étude qu’il vient de publier "la prairie, un enjeu économique et social".

Attaque en règle contre l'élevage
L’inquiétude est d’autant plus justifiée que les attaques contre l’élevage font fureur. Les ruminants sont souvent présentés comme un danger pour la planète. Ils seraient mauvais transformateurs d’énergie et de protéines puisqu’il faudrait sept kilos de céréales pour faire un kg de viande bovine. Pire, ils seraient producteurs de gaz à effet de serre, essentiellement du méthane dégagé par les animaux et à ce titre participeraient au réchauffement climatique. Une étude de la FAO estime que l’ensemble de la filière, depuis l’épandage des engrais pour la production de fourrages, de céréales, de soja jusqu’à la transformation et la distribution des produits animaux serait responsable de 18 % des émissions de gaz à effet de serre. Soit davantage que les transports au niveau mondial !
Pourtant l’élevage de ruminants et la prairie présentent un certain nombre d’atouts environnementaux qui sont souvent méconnus soulignent les auteurs. L’Institut de l’élevage en dresse la liste. Sur la qualité de l’eau d’abord. Selon différents travaux, les plus faibles concentrations en nitrates des eaux de surface s’observent dans les régions où les prairies permanentes couvrent plus de 70 % de la SAU. Ce sont les zones herbagères du Massif central, de Franche-Comté, des Alpes et des Pyrénées. Autre effet positif de la prairie sur l’environnement : son association avec le bocage évite les crues.
Piège à carbone
On ignore que la prairie stocke le carbone : une récente étude de l’Inra montre que, sur les 30 premiers centimètres du sol, la quantité de carbone est de 70 tonnes par hectare pour les prairies permanentes, contre 45 tonnes pour les sols en culture annuelles.
Autres intérêts de la prairie, sa contribution à la biodiversité à fois sur la flore et la faune, son rôle dans la prévention des risques d’incendie dans les zones méditerranéennes et des avalanches en zone de montagne. Contrairement à la forêt, la prairie maintient des paysages ouverts et accueillants, ce qui favorise le tourisme. Enfin, l’Institut note que l’herbe dans l’alimentation des ruminants favorise la qualité des produits laitiers, voire de la viande. Ce n’est pas un hasard si de nombreuses AOC fromagères sont localisées dans les zones herbagères.
Bref, les systèmes herbagers génèrent des productions "conjointes", ce qu’on appellent des aménités positives : lutte contre l’érosion, régularisation des rivières, qualité des eaux, réduction de l’effet de serre, attractivité des territoires…. Ce qu’on appelle aussi "des biens publics" qui échappent à la logique du marché, et qui ne peuvent être valorisés que par des aides publiques.
C’est la raison pour laquelle, l’Institut de l’élevage tire la sonnette d’alarme à un moment où des incertitudes pèsent sur l’avenir de la politique agricole commune et notamment le second pilier. Un second pilier dont on parle beaucoup, mais qui est le premier sacrifié dans les arbitrages budgétaires.
(1) La prairie, un enjeu économique et sociétal. Le dossier Economie de l’Elevage. Hors série. Janvier 2007.