Changement climatique : des éleveurs laitiers en voyage d’étude en Pays de la Loire
Dix éleveurs du groupe lait bio Rés’Agri Pays de Pontivy sont partis deux jours du 24 au 25 août 2021 en Pays de la Loire. Quatre exploitations leur ont ouvert leurs portes : Gaec La Croix Brillet, station expérimentale de Thorigné d'Anjou, Gaec de la Pature et Gaec de la Limonière. De nombreux échanges ont eu lieu autours de thématiques bien souvent plus larges que l'adaptation face au changement climatique".

Chacune des quatre exploitations rencontrées s’adapte en fonction de son contexte pédoclimatique et des opportunités. L’investissement dans un séchage en grange (Gaec de la Croix Brillet) ou dans un séchage en botte (Gaec de la Limonière) permet une souplesse d’exploitation avec des récoltes plus précoces permettant de faire du stock fourrager de qualité rapidement.
Utiliser au mieux la ressource en herbe
Les éleveurs utilisent au mieux la ressource en herbe dont ils disposent. Au Gaec de la Croix Brillet, concernant les mélanges prairiaux, les variétés sont choisies notamment pour leur résistance à la sécheresse. Afin d’allonger la durée et la surface de pâturage, un boviduc a été construit en 2018 et permet de rendre 27 ha de prairies accessibles. Différents sur-semis d’espèces prairiales résistantes à la sécheresse ont été testés sur ces exploitations, tels que le mélange chicorée-plantain avec des difficultés cependant de gestion de la chicorée au pâturage. "La mise en place du pâturage tournant dynamique permet une meilleure gestion des stocks d’herbe", souligne Benjamin, du Gaec de la Pâture. Il pratique aussi la technique du bale grazing en été lorsque la pousse de l’herbe est ralentie voire stoppée par les fortes chaleurs. "Cela permet de maximiser le retour de matière organique pour plus de résilience des sols face au changement climatique". D’autres ont recours à l’affouragement en vert de luzerne en période chaude, lorsque la ressource en herbe est limitée.
Le contexte pédoclimatique hydromorphe l’hiver et séchant l’été de la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou a conduit à réaliser depuis maintenant plusieurs années de nombreux essais pour arriver à l’autonomie fourragère. Le groupe a pu se rendre sur place et échanger autour des différentes stratégies pour maximiser la production fourragère en début et fin de saison via des essais de prairies multi-espèces à base de fétuque élevée mais aussi des prairies semées sous couvert de méteil grain ou ensilage.
L’organisation du travail et la dualité vie professionnelle et personnelle
De nombreux échanges ont précisé l’organisation du travail choisie entre les associés, l’importance de la communication et de la spécialisation dans les tâches ; chacun sait ce qu’il a à faire et chaque outil a sa place. "On utilise un groupe whatsapp pour communiquer entre nous", l’intégration des réseaux sociaux permettant de fluidifier les échanges et maintenir la cohésion entre les associés. Pour beaucoup, l’organisation du travail tourne autour de la vie familiale : le travail doit être terminé pour déjeuner et dîner avec les enfants, les amener à l’école. "On aimerait passer à cinq semaines de vacances" : au Gaec de la Croix Brillet, la recherche de temps libre et de vacances est affichée comme un objectif de l’exploitation. Les associés y prennent actuellement deux week-ends de repos sur trois et quatre semaines de congés par an.
Se confronter à un territoire dont les effets du changement climatique sont plus importants.
Diversification des ateliers de production
La diversification des ateliers de production est une solution à la fois sociale et économique : "Avec la surface que l’on a je suis persuadé que l’on peut arriver à faire vivre plus de personnes". Pour l’ensemble des éleveurs rencontrés, la production de richesse économique et humaine sur l’exploitation est mise en avant comme un objectif principal via la diversification. Cela s’illustre ici par la création d’un atelier de Plante à parfum aromatique et médicinale (PPAM) avec production de mélisse et menthe en plein champ, la création d’un atelier de transformation fromagère, ou encore un atelier de maraîchage plein champ. Encore une fois, chaque exploitation doit composer avec son contexte et ses opportunités socio-économiques environnantes mais toutes ces initiatives ont permis l’embauche de nouveaux salariés au sein des exploitations.
En vache laitière, la maîtrise des débouchés est importante notamment sur la filière des veaux mâles. Le Gaec de la Limonière est organisé en un réseau d'éleveurs afin de valoriser 100 % des veaux mâles de race Jersiaise via une filière de qualité pour de la restauration de luxe.
Un point commun de ces exploitations dans la diversification de leurs ateliers et/ou une meilleure valorisation de leurs produits est l’adhésion à des réseaux existants comme "invitation à la ferme", la coopérative Biocoop. Ces réseaux rendent ces initiatives de diversifications possibles pour les exploitants. Cela permet d’avoir des débouchés, le retour d’expérience des contributeurs, de démarrer sereinement et de pérenniser sa structure.

Retour et perspectives pour le groupe Lait Bio
En parallèle de leurs réflexions sur l’adaptation au changement climatique, les agriculteurs du groupe travaillent aussi sur leurs propres émissions et stockage de gaz à effet de serre (GES). Ces derniers ont réalisé des bilans carbone Cap2ER afin de pouvoir se situer ainsi que d’identifier quelles sont leurs marges de progrès pour réduire leurs impacts sur les GES.
Lors d’une journée de restitution début novembre de nombreux échanges ont permis de réfléchir aux perspectives, à la mise en place d’essais, de rendez-vous techniques et de visites pour plus de performances économique, sociale et environnementale des exploitations.
Le groupe lait bio Rés'Agri Pays de Pontivy
Le groupe lait bio est composé en majorité d’éleveurs bio avec des systèmes de productions divers qui se regroupent depuis plusieurs années autour de thématiques communes. En 2021, ils ont décidé de poursuivre leurs travaux en étant reconnu groupe GIEE pour trois ans autour des thématiques suivantes :
- améliorer la résilience des élevages laitiers face au changement climatique ;
- contribuer à la baisse des émissions de gaz à effets de serre ;
- consolider la stratégie technico-économique et sociale des élevages.
C’est dans ce cadre que ces éleveurs sont partis pour échanger et recueillir des idées et des innovations à tester sur leurs exploitations. Chacun ayant un contexte pédoclimatique et des impacts du changement climatique différent, il était important pour eux d’aller se confronter à un territoire dont les effets du changement climatique sont plus importants. Ce sont des échanges riches qui ont rythmé ces deux jours autour de thématiques bien souvent plus larges que l’adaptation face au changement climatique.
Au Gaec de la Croix Brillet, des vaches à 10 000 l grâce à une alimentation complexe en quasi autonomie
La ration hivernale comporte 10 kg de foin séché/ 3 kg de colza enrubanné/ 3 kg d’enrubannage de légumineuse/ 5 kg de maïs grain humide/ 1 kg de tourteau de soja/ 3 kg d’un mélange orge-féverole.
"Différentes pratiques sont réalisées sur l’exploitation permettant d’améliorer nos rations : le sur-semis de pois dans la luzerne en fin de vie permet de la redynamiser après la dernière coupe d’été et de réussir un ensilage de qualité. Nous faisons aussi de l’enrubannage de colza. Récolté fin octobre à 20 % de MS, cet enrubannage amène de la saveur à la ration et de l’eau, ce qui dans la cadre d’une ration sèche, permet d’améliorer l’appétence et l’ingestibilité de la ration de base", témoignent les associés.
Au Gaec, chaque mélange prairiaux est adapté et réfléchi en fonction de son utilisation : mélanges destinés au séchage en grange : luzerne/fléoles/TH/TB/TV mélanges destinés pour le pâturage : RGA/TB/TH/TV/fléole/lotier ou luzelle/fétuque.