La PAC au menu des élections du conseil régional ?
Benoit Biteau député européen écologiste était mercredi dernier l'invité de Olivier Allain et de Loïg Chesnais Girard, vice président et président du conseil régional de Bretagne. Cette rencontre centrée sur la PAC avait été précédée d'un échange avec André Sergent, président de la chambre régionale d'agriculture. Retour sur ces échanges qui laissent penser qu'au delà des positionnements stratégiques sur la PAC, l'agriculture pourrait bien devenir un élément central du débat à quelques semaines de l'ouverture de la campagne pour le renouvellement des conseils régionaux, prévues initialement en mars, et actuellement repoussée en juin.

Lors de la conférence de presse qui a suivi la rencontre entre les quatre élus, Benoit Biteau a indiqué son espoir de voir "la Bretagne engager une mutation de ses pratiques agricoles", vers une "nouvelle projection de trajectoire" en proposant "d'accompagner la région dans ce changement" en "trouvant des points de convergence". "La Bretagne est très regardée", souligne-t-il , du fait "des algues vertes bien sûr, du débat sur les excédents structurels azotés" et la "conformité de la directive cadre sur l'eau", il souligne malgré tout sa "participation à la sécurité alimentaire" du pays. Pour lui, l'Europe a avec l'argent public de véritables leviers de changement. Il ne s'agit pas d'ingérence, mais "l'argent public ne doit pas tout accompagner", mais au contraire lister des "règles de conditionnalité".
Soutien à l'actif plus qu'à l'hectare
Loïg Chenais Girard indique pour sa part son souhait de voir l'Europe et la PAC privilégier un "soutien à l'actif" , qu'il souhaite encadré d'un plancher à 5 000 €, et d'un plafond de 30 000 € afin d'éviter la course à l'hectare, et soutenir une "agriculture pertinente et performante". Son ambition est de rester sur une "agriculture familiale à haute intensité d'emploi". Un paiement redistributif tendant vers le chiffre de 20 % est indispensable sans quoi la réforme de la PAC impactera les agriculteurs Bretons.
Les deux hommes se retrouvent sur la notion de "régionalisation des aides PAC", pour que "chaque territoire trouve lui même ses équilibres". Même s'ils reconnaissent que "la Bretagne est maintenant isolée" sur cette question dans les débats nationaux ou européens de la PAC.
Sortir du triptyque soja ammonitrate, gasoil
"On a territorialisé, spécialisé la production" indique Benoit Biteau. Selon lui il faut tenter d'inverser cette tendance au travers d'un nouvel équilbre des territoires en évitant de spécialiser ces derniers. Loïg Chesnais Girard parle lui de "sortir de l'économie linéaire" basée sur le triptyque "ammonitrate, soja, gasoil", "pour une économie circulaire régionale" qui permettrait à la fois de tendre vers plus d'autonomie, plus de souveraineté alimentaire et de répondre aux enjeux environnementaux et de stockage de carbonne. Il formule le souhait par exemple de trouver avec la région Centre les moyens d'échanges protéines végétales contre matières organiques, le choix d'une alimentation animale "locale" au lieu d'une "alimentation off shore".
Au delà des grands points de consensus lorsque les débats entrent un peu plus dans le détail apparaissent des éléments de divergence assez forts. Ainsi Benoit Biteau réfute l'idée d'aides de la région pour des "poulaillers industriels". "Qu'est ce qu'un poulailler industriel ?", lui répond Loïg Chesnais Girard, en comparant la Bretagne et l'Ukraine. Il n'oublie pas non plus de rappeler que le consommateur a de toute façon choisi puisqu'à 70 % le poulet présent dans la restauration collective est importé au détriment de l'économie, et des productions locales.
Même chose sur le bocage ou Benoit Biteau estime que l'on met beaucoup d'argent sur la table pour replanter mais sans contrôle sur le maintien des haies. Loïg Chenais Girard indiquant qu'il souhaiterait avoir sur ces questions une négociation globale avec les coopératives. Il estime que la gestion de l'écosystème pourrait être de la responsabilité de la coopérative.
Un débat large sur tous les grands sujets du moment , la PAC l'autonomie, protéique et alimentaire, avec en toile de fond le souhait de "profiter de la courbe démographique, pour installer plus de jeunes et mener une transition écologique et économique". On l'a bien compris la question agricole sera au coeur des débats de la future campagne pour les élections du conseil régional.
Expliquer le projet stratégique des chambres
André Sergent participait à la rencontre le matin avec les élus régionaux et Européens. A l'issue de la conférence de presse il estimait nécessaire "d'être ouvert à ce genre d'échanges" pour "expliquer dans les grandes lignes le projet stratégique des chambres". "Les volumes et les quantités ne sont pas l'objectif premier" de ce projet. Le "premier objectif des agriculteurs" et des chambres d'agriculture c'est que ces derniers "vivent décemment de leur métier".
Participer à ce genre d'échange c'est "donner la possibilité pour le Bretagne d'avoir voix au chapitre et de défendre ses intérêts". La Bretagne est ainsi "la région qui a l'apport le plus faible de la PAC ramené à l'unité de main d'oeuvre, un point qu'il ne faut pas oublier au moment où l'on parle de paiements redistributifs". "Pour une PAC qui encourage clairement l’emploi et une agriculture à haute intensité humaine, il faut orienter les paiements à l'actif". Avec ses agriculteurs, "la Bretagne contribue à la souveraineté alimentaire de l’Europe et donc à la sécurité alimentaire de nos concitoyens. Il ne faut jamais perdre cela de vue". En fait "il reste beaucoup de chemin à parcourir", souligne le président de la chambre régionale.