FESTIVAL de L'ENFER, paradis du muscadet !
Pendant le Hellfest, près de 200 000 personnes convergent vers la petite ville de Clisson (7 500 habitants). Ces hordes de métalleux, de noir vêtus et porteurs d’accessoires sataniques sont loin de faire peur aux vignerons locaux. Au contraire : pour eux, ce festival de l'enfer est plutôt une bénédiction.

un peu peur de cette proximité, ils constatent qu'en 14 ans de festival, il n'y a jamais eu de casse dans la vigne.
En bas à gauche,
on aperçoit le bar à muscadet, idéalement situé à côté des zones de restauration.


18 400 LITRES AU BAR, PLUS ENVIRON 2000 BOUTEILLES À LA SORTIE DU FESTIVAL. ON EST QUAND MÊME LOIN DE LA BIÈRE (400 000 L). AUCUN ARGENT N’EST ÉCHANGÉ,
ON PAYE AVEC SON BRACELET.
Il est bien loin le temps ou quelques religieux integristes venaient repandre de l'eau benite sur les festivaliers, pour leur demander de ne pas s’adonner a leur culte satanique. Alors que la 14e edition du Hellfest vient de se tenir a Clisson (44), du 20 au 23 juin, on trouvera bien peu de gens du cru pour se plaindre du Hellfest. Ni les commerçants, ni les habitants (dont beaucoup s'improvisent hebergeurs), ni les retraites (souvent invites a visiter le site), ni les taxis... ni, bien sur, les vignerons. Depuis les debuts du festival, en 2006, le monde viticole, et plus generalement le monde agricole, est associe au Hellfest. Tout simplement parce qu’il se deroule sur des terrains agricoles ! "Une partie des terres sont louees a l'annee. Une autre partie, seulement pour le temps du festival. Ce sont des prairies et elles sont fauchees environ 15 jours avant le debut du Hellfest", rappelle Frederic Loiret, vigneron clissonnais implique depuis 2006 dans l’organisation de la presence viticole. "Il y a eu un peu de vignes arrachees, mais le festival a paye leur replantage ailleurs". Et Frederic Loiret de rappeler que Ben Barbaud, le directeur du festival, est un enfant du vignoble : il a meme etudie au Lycee agricole Charles Peguy, ou il a passe un BTS technico-commercial en vin et spiritueux.
Un bar de 300 m2
Si certains regrettent le temps des coups de main benevoles, des prets de materiel et des permanences de 14 heures au bar, aujourd'hui, tout est tres cadre pour assurer la presence des vignerons clissonnais au sein du festival. Le lieu nevralgique, c'est le bar a muscadet. La petite cahute de 6 m2 en 2006 est devenue un bar de 300 m2, anime par 82 bene- voles : les vignerons en activite des sept domaines clissonnais, leurs familles, leurs amis proches, leurs collaborateurs... Le bar a muscadet se situe au fond d'un espace arbore, dans lequel les festivaliers viennent prendre le frais, espace delimite par le portail du "Kingdom of muscadet". Conçu en 2013 par le collectif artistique Barbe Verte de Saint-Fiacre-sur-Maine, en partenariat avec Interloire, ce portail monumental constitue desormais un des points de reperes inratables du festival.
Au bar, on consomme du vin, au verre ou au pichet. Tout vient de Bag in box car les bouteilles sont proscrites sur le site, securite oblige. Chaque annee, les volumes de vins vendus augmentent. L’an dernier, on etait a 17 000 litres ; cette annee, on a depas- se les 18 400 l. Le muscadet se taille la part du lion des ventes, avec 60 % des volumes, le reste etant du gamay rose (25 %) et du gamay rouge (15 %). Le muscadet vendu est un sevre et maine tout simple, issu des vignes de la commune, frais et fruite.
Un moment exutoire et qui resserre les liens entre vignerons
Frederic Loiret gere l'equipe de benevoles : chacun doit realiser au total 16 heures de permanence, sur trois journees. Les conditions sont difficiles (le bruit est tel qu’il faut crier toute le temps), mais les benevoles affichent un sourire sans faille. "Les gens sont super gentils, l’ambiance est tres bon enfant" remarque Maryline Salaud, benevole et inspectrice viticole dans le civil. "Et l’organisation est top, le systeme cashless, c’est genial". Frederic Loiret voit aussi le festival comme un moment exutoire, pour des vignerons rudement eprouves par le gel et par les conditions economiques difficiles. "On fait des heures, mais cela renforce nos relations pour le reste de l’annee". Et ils n’entendent autour d’eux que des compliments sur leur travail. Y compris de la part du directeur : "Ben vient nous voir chaque jour, pour prendre son apero". En plus du bar a muscadet, deux autres stands, a la sortie du festival et au camping, proposent du muscadet au verre, mais aussi en bouteille. Cette fois, c'est du sur-lie, vendu a 8 €, de maniere equitable pour chacun des sept domaines. Chaque vigneron clissonnais a en effet le droit de tirer une cuvee Hellfest, en reprenant le logo officiel dans son etiquette. "Les gens aiment bien rapporter un souvenir. La, il y a moins de bruit, on peut discuter" , remarque Jacques, beau-frere de vigneron, accompa- gne de Gwen et Kevin, eux aussi de famille viticole. "On peut rencontrer des gens de tous les pays. Nouer des liens. Et on peut les convertir au muscadet". Avec sans doute un peu plus de succes que les religieux integristes des debuts...