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À Trévarez, le test d’une caméra mesurant l'état corporel des vaches laitières
Il est maintenant possible de se procurer une caméra évaluant l’état corporel des vaches laitières dans l’objectif d’améliorer le monitoring. Le test mené par les chambres d’agriculture de Bretagne vise à vérifier la qualité de la notation mesurée en s’appuyant sur un troupeau conduit en agrobiologie.

La société suédoise Delaval est un fabricant d’équipement de traite bien implantée en Bretagne. Avec la société Lely, ce sont deux distributeurs importants de robots de traite. En 2015, cette société a mis au point une caméra permettant d’évaluer l'état corporel des vaches laitières, à partir d’une analyse d’images du dos de l’animal. La caméra est placée sur le robot ou sur la porte de tri. Des mesures sont effectuées à chaque passage de vache. Cette caméra a été installée à la station expérimentale des chambres d’agriculture de Bretagne (Trévarez, Finistère) et testée sur un lot d’animaux où l’état corporel varie beaucoup pendant la lactation : le troupeau trait par un robot déplaçable conduit en agriculture biologique.
La caméra BCS de Delaval n’a pas fait ses preuves sur un troupeau économe
Le suivi d’un troupeau laitier est réalisé à partir de plusieurs indicateurs, notamment la production, la qualité du lait et l’évolution de l’état d’engraissement des animaux appelée la note d’état corporel (NEC). Cette notation prend du temps et le jugement des évaluateurs peut conduire à des scores différents de la NEC pour la même vache. De ce fait, plusieurs laboratoires travaillent à l’élaboration de modèles permettant l’interprétation d’images et proposent des méthodes d’estimation des réserves corporelles des vaches laitières annoncées comme plus objectives.
À Trévarez, la collecte des données a démarré en mai 2015 sur un troupeau de race Prim’Holstein. La caméra a été positionnée à l’entrée d’une porte de tri qui se situait à l’aval d’un robot de traite. Les données de la caméra ont été recueillies tous les jours jusqu’en août 2017. En parallèle, un technicien a réalisé, sauf exception, les mesures une fois par mois sur ce même troupeau avec la méthode habituelle. Au total, 18 mois de mesures de NEC ont été recueillis et analysés avec l’appui de Coralie Charpentier, étudiante à Agrocampus Ouest à Rennes.
Des résultats surprenants
La NEC manuelle a été réalisée sur l’échelle de notation française de 0 à 5 établie par Bazin (1984) avec incrément de quart de point. La caméra utilise une échelle américaine allant de 1 à 5 (Wildman, 1982, et Edmonson, 1989) (1).
La variabilité des NEC attribuées par la caméra en comparaison de la NEC visuelle est très forte (2). Les observations d’états corporels s’écartent de la droite théorique (correspondant aux résultats attendus identiques entre les deux méthodes), par exemple sur le graphique, pour une NEC de 2,5 sur l’échelle française, la caméra peut attribuer une NEC qui va de 0,5 à 3,25.
Pas d'effet du stade de lactation
Lorsqu’on étudie l’évolution de la NEC au fil de la lactation (3), la courbe des NEC mesurées par la caméra fluctue peu en comparaison de celle reprenant les mesures du technicien. La courbe des NEC mesurées par le technicien est plus en cohérence avec les dynamiques de NEC théoriques. Il y a une diminution de l’état au début de lactation et une reconstitution des réserves durant la fin de lactation donc une NEC qui augmente.
En conclusion
Malgré l’utilisation d’une grille de notation de la NEC différente de celle utilisée généralement en France, les écarts entre les NEC proposées par la caméra BCS et les notations réalisées par un technicien de la station expérimentale sont toujours supérieurs à 0,5 point. Les notes proposées par la caméra fluctuent peu selon le stade de lactation. La caméra BCS ne semble pas avoir été calibrée pour des troupeaux bas intrants où il est souvent constaté des variations de NEC importantes, et c’est dommage puisque ce sont des systèmes qui se développent en France.