Trop de porcs : l'État demande à la filière de s'organiser
Mardi 2 juin, un plan de filière porcin a été discuté en préfecture de Région pour tenter de résoudre le problème de fluidité des élevages bretons. Du côté des syndicats, l'issue de la réunion ne satisfait pas les éleveurs qui demandaient une aide de l'Etat pour dégager les porcs. La Préfète a demandé à la filière de s'organiser. Le point de vue syndical avec Carole Joliff, présidente de la section porcine FDSEA 22 et administratrice FNP.

La réunion organisée à la préfecture de Région à Rennes, en présence de la préfète, du président du conseil régional et des acteurs amont et aval de la filière, n'a pas répondu aux attentes exprimés par les éleveurs. Tous les représentants étaient conviés - syndicat, union des groupements, comité régional porcin, abatteurs, chambre d'agriculture de Bretagne, conseil régional... - afin de trouver une solution à l'engorgement des élevages bretons. Car même si l'abattoir Kermené a repris son activité "normale" la semaine dernière, la situation dans les élevages mettra plusieurs semaines avant de se débloquer. Risques sanitaires, résultats techniques dégradés, déclassement important, mortalité, non respect du bien-être animal... la situation est désastreuse, selon les syndicats.
Une demande d'aide pour dégager rapidement les porcs
Déjà, dans une lettre ouverte, envoyée fin mai aux politiques du département des Côtes d'Armor, FDSEA et JA alertaient : "180 000 porcs sont en retard de départ de fermes dans la région dont 55 000 à date du 27 mai qui devaient être abattus à Kermené. Pour ce dernier, ce sont 1 112 sites d'élevage qui sont concernés et autant de familles et de salariés qui en sont les dommages collatéraux. A terme, c'est l'ensemble des élevages qui sont mécaniquement affectés par cet embouteillage de cochons".
Une position, portée à "l'unanimité" par les acteurs du comité régional porcin (UGPVB, FRSEA/JA, Crab, Uniporc, MPB) pour évacuer les 55 000 porcs vers des débouchés autres, était de demander "à l'Etat une enveloppe d'un montant de 10 millions d'euros ainsi qu'une enveloppe de dégagement hors Union européenne afin d'assainir le marché engorgé", explique Carole Joliff, présidente de la section porcine FDSEA 22 et administratice FNP. "L'Etat doit assumer toutes ses décisions ayant impacté l'ensemble de la filière. Cela fait trois mois que les éleveurs nagent en eaux troubles... dans un contexte de commerce complètement désorganisé décidé sur fond de crise sanitaire", .
En effet, les trois fériés de mai ont été préjudiciables à la fluidité auxquels est venue s’ajouter la fermeture ou l'activité réduite, pour raison sanitaire et par manque de personnel, de deux abattoirs dont celui de Kermené dans les Côtes d’Armor et de Tradival dans le Loiret. "Les reports sont importants, traduits par des poids à 97 kilos de moyenne à fin mai, et jusqu’à 100 kg pour certaines OP", indique le marché du porc breton dans sa note mensuelle.
Un refus de la Région
Mardi 2 juin, les pouvoirs publics ont répondu qu'il n'y avait pas d'aides à attendre et que la filière devait s'organiser. Il est demandé aux abatteurs d'augmenter les capacités d'abattage, de faire moins de découpe de porcs et de trouver des marchés de dégagement. La finalisation du projet d'AOP (association d'organisation de producteurs) a également été soulignée. Côté éleveurs, on craint que même si la fluidité repart, le prix restera bas dans un marché qui mettra trop de temps à se désengorger. "La réponse est difficilement acceptable ! Nous sommes corvéables à merci et en plus on nous reproche de ne pas être organisés en filière. Alors que d'autres secteurs reçoivent des plans d'aides, l'agriculture n'est pas prévue dans le plan de crise de l'Etat car nous avons toujours été au travail pour fournir les magasins, alors que nous connaissons une crise structurelle", s'indigne l'éleveuse de porcs Label rouge, très déçue de la position de l'Etat. "Et comment trouver de la solidarité auprès des abatteurs qui n'y ont aucun intérêt commercial". Et même si le commerce reprend vers l'export, elle indique que la logistique et la capacité à exporter ne sont pas au rendez-vous. Et de conclure, quant à l'AOP, "c'est l'administration qui bloque le dossier !".
180 000 porcs sont en retard de départ de fermes dans la région