Comment financer les investissements du bien-être animal
Faire évoluer le parc bâtiment français est un chantier complexe d'un point de vue de la faisabilité pratique et technique. D'un point de vue économique également se pose le financement des surcoût de production et des voies de financement possibles ? Des chiffres et des pistes sont présentés par l'Ifip.

Estimer le besoin en financement de la ferme porcine France est un préalable à toute stratégie d'évolution. En premier, le surcoût du passage de la case bloquée classique en maternité à la case libre d'un bâtiment existant est estimé à 23 € par truie présente et par an, ou 1,1 ct/kg carcasse. Le besoin d'investissement pour une ferme type de 252 truies (conduites en 7 bandes de 36 truies), qui comprend la construction à neuf de 24 places liberté et la transformation de 48 places est estimé à plus de 300 000 €. Ramené à la truie en production, le coût s'élève à 1 220 €. Avec une annuité sur 15 ans à 2 %, il est calculé un coût de 3,5 € par porc produit (productivité de 27 porcs/truie en production). Etendu à la ferme France, le besoin en investissement s'élève donc à "un milliard d'euros", conclut Christine Roguet à l'occasion de la conférence TechPorc.
De même pour l'engraissement, l'augmentation de la surface de 0,7 m² à 1 m² génère un surcoût évalué à 8 € par porc produit dans le cas d'une rénovation de 70 % des places, avec 30 % de places neuves. Là encore, le besoin en investissement est conséquent de l'ordre de 2,5 milliards d'euros à l'échelle du territoire.
Quels leviers pour financer la transformation
Le levier technique est évoqué par Christine Roguet. Par exemple, "pour amortir les surcoûts, un gain de 0,5 porcelet par portée ou une réduction de l'indice de consommation de 0,1 point améliore la marge sur coût alimentaire de 3 et 2 euros par porc respectivement". Pour autant comment parvenir à financer la transformation des élevages ? Deux voies sont envisageables. "Faire payer les consommateurs en augmentant les prix à la consommation soit par des taxes, soit par une segmentation du marché ou faire payer tous les contribuables par une réorientation des aides publiques de la PAC ou du plan de relance national", explique la spécialiste. Segmenter le marché, pourquoi pas mais des sondages réalisés en 2018 et 2019 indiquent pour le premier que seul 64 % des consommateurs enquêtés sont prêts à payer plus cher la mise en place d'un label bien-être animal et 54 % pour le second. 80 à 90 % sont cependant favorables à ce type de label...
Autre possibilité étudiée en Allemagne, celui de taxer les produits animaux. Parmi les pistes, la "taxe d'accise" serait affectée à une quantité (prélevée par kg vendu, et non sur la valeur comme la TVA), reversée au bien-être animal. Une demande de 40 cts par kg de viande produirait un total de 3,6 milliards € par an, ce qui couvrirait les besoins. Le ministère de l'Agriculture étudie cette option qui engendrerait un surcoût de 35 € pour un consommateur moyen par an. Autre solution : subventionner les investissements de façon plus importante via la PAC, dont la mesure 14 du 2e pilier (pas encore actionnée sur les territoires) et/ou les écorégimes du 1er pilier de la future PAC. Voire le plan de relance français.
Si d'un côté, la filière porcine doit arbitrer sur le chemin à prendre en matière de bien-être animal, d'un autre côté, la puissance publique doit appréhender le soutien envers la ferme France.