Enjeu Phytos : Eaux du Pays de Saint-Malo, réduire l’usage d’herbicides
Depuis quelques années, des molécules de produits phytosanitaires, et notamment des métabolites de dégradation de S-métolachlore, herbicide couramment utilisé en culture de maïs, sont retrouvées dans les eaux brutes prélevées à l’usine d’eau potable de Beaufort (35). Pour remédier à cette problématique, collectivité, chambre d’agriculture, agriculteurs... se mobilisent pour mettre en place des actions vertueuses et résilientes. Ce qu’il s’y fait !

Face à la problématique de résidus pesticides retrouvés dans les eaux, dont certains sont difficilement filtrables et traitables, la collectivité Eau du Pays de Saint-Malo, en collaboration avec la chambre agriculture, a mis en place un certain nombre d’actions visant à réduire l’usage des produits phytosanitaires sur les bassins versant de Beaufort, Mireloup et Landal.
Désherbage mécanique
L’action phare dans la réduction des produits phytosanitaires : le désherbage mécanique ! Une action déjà mise en place depuis 2018 et soutenue financièrement depuis lors, par la collectivité, sur une surface de 5 ha maximum, dans la limite de 300 €/exploitation. Grâce à cette aide, Laurent Couapel, éleveur de vaches allaitantes et de porcs avec son frère, sur la commune de Baguer Morvan (35), BV de Beaufort, a pu tester, il y a deux ans, cette pratique, en réalisant un passage de houe rotative, dont s’est équipée la Cuma locale, en complément de leur herse étrille. Pour lui, c’est une évidence, pour que la pratique se démocratise, il faudra que le parc matériel se développe. Une dynamique déjà amorcée grâce notamment à certaines aides à l’investissement, dont les PCAEA et une prise de conscience de la profession. "Il y a quelques années, c’était encore anecdotique.Aujourd’hui, les agriculteurs se montrent de plus en plus intéressés. Particulièrement ici, on a connu des périodes de restriction lorsque nous étions classés BV contentieux, nous ne souhaitons pas revivre ça, (…) nous essayons d’être pro-actifs", explique Laurent Couapel.
Mise un place d'un PSE
Dans cette optique, un dispositif de paiements pour services environnementaux (PSE) a été mis en place pour valoriser financièrement leurs actions sur le territoire du syndicat mixte. "Nous sommes en quelque sorte un peu producteurs d’eau nous aussi, car l’eau traverse nos terres, nous sommes donc impliqués dans cet enjeu qualité, il semble normal que si nous devons faire des efforts, nous soyons rémunérés pour notre contribution", expose l’éleveur. Ainsi, "jusqu'à octobre, il sera possible de candidater", explique Marion Soulié, conseillère à la chambre d’agriculture. Quatre mesures ont ainsi été construites avec les agriculteurs et les montants compensatoires ont été fixés en concertation avec la profession. "C’est important, que ça viennent de la profession et que cela ne soit pas toujours descendant", ajoute-t-elle. Et parmi ces actions, à nouveau le désherbage mécanique. Ainsi, en 2022, l'éleveur envisage de réitérer l’expérience grâce aux PSE. "C’est une opportunité, changer nos habitudes, nos pratiques, ça ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut du temps pour s’approprier ces nouvelles techniques et les PSE permettent de sécuriser et de rassurer les agriculteurs", estime-t-il. Ainsi, selon le nombre de passages réalisés (de 1 à 3), il pourra prétendre à une aide allant de 50 à 130 €/ha/an.
L'herbe... un atout
D’autres actions, comme l’ (re)incorporation des prairies dans les rotations, sont financées par ce dispositif, à hauteur de 356 €/ha à l’année d’implantation puis 200 €/ha pour le maintien. "Après une prairie, la pression adventices est nettement plus faible, les besoins en herbicides sont donc amoindris", explique la conseillère. De plus, l’implantation de bandes enherbées, jouant un rôle tampon, sera subventionnée, le long des fossés circulants, non classés cours d'eau et ne rentrant donc pas dans le cadre réglementaire. Ils ont pu être identifiés grâce au diagnostic des parcelles à risques de transfert (multi-polluants) DPR2. Ce diagnostic, nécessaire à l’obtention des PSE, a parallèlement été réalisé sur l’ensemble des exploitations des deux autres BV, qui quant à eux, bénéficient d’autres dispositifs : AFAFE (Aménagement Foncier Agricole, Forestier et Environnemental).
Un groupe 30 000 pour aller plus loin
Récemment, la chambre d’agriculture a lancé un nouveau groupe de développement sur la thématique de l’agriculture de conservation et la réduction des produits phytos. Le groupe actuellement composé de 6 personnes, souhaite accueillir d’autres agriculteurs désireux d’en apprendre plus sur les techniques TCS, semis directs, régénération du sol...
Pour plus de renseignements, contactez : Marion Soulié, chambre d’agriculture de Bretagne, 06 45 47 76 72.