Le bassin versant du Chifrouet : Un test grandeur nature
Depuis maintenant deux ans, le bassin versant du Chifrouët est un territoire pilote accueillant un projet(1) de gestion collective et durable des adventices du maïs et de protection des cours d’eau. Techniquement, les pratiques et aménagements promus dans le cadre du projet ont fait leurs preuves. Souvent testés par de nombreux agriculteurs et analysés par des chambres d’agricultures et instituts techniques, notamment en Bretagne, ceux-ci visent une réduction des besoins des stratégies de désherbage en quantité d’herbicides et la limitation du transfert de ces derniers vers les cours et fossés.

Moins de besoin en herbicides contribue efficacement à améliorer la qualité de l’eau
Les données d’enquêtes de 2019 ont montré que le secteur du bassin versant Chifrouët où les agriculteurs avaient utilisé le plus de matières actives (958 gMA/ha(2) en moyenne) étaient ceux où le cours d’eau était le plus contaminé (pic maximal mesuré au mois de juin à 15,5 µg/l). En 2020, certains agriculteurs de ce secteur ont fait évoluer leurs stratégies de désherbage, notamment en y intégrant une intervention de binage. La moyenne du secteur est ainsi descendue à 579 gMA/ha. Le pic maximal mesuré au cours de cette seconde campagne était de 8,3 µg/l. Dans le secteur du bassin versant où les agriculteurs sont en moyenne les plus économes (370 MA/ha), le pic maximal était cette même année de 4,8 g/l. Dans nos essais désherbage maïs, les stratégies bas intrants combinant une intervention de désherbage chimique et une intervention de binage sont les plus efficaces et nécessitent souvent moins de 300 gMA/ha. Si de bons résultats sont obtenus assez facilement dans la plupart des parcelles enquêtées, ça l’est moins dans une minorité d’entre elles. Les parcelles en non-labour notamment, ont souvent des pressions en graminées estivales ou de véronique et parfois en ray-grass résistant plus fortes. Seul, le désherbage mécanique ne sera pas efficace dans ces situations. Un décalage de date de semis combiné à des faux semis ou mieux encore un allongement de rotation consolideront la stratégie.
Des transferts vers les milieux peuvent être évités
Pour le second volet technique, il faut prendre de la hauteur et regarder où se situe la parcelle dans son paysage et voir par où et comment les eaux de pluie qui y tombent, rejoignent les fossés ou cours d’eau (cf. photo aérienne). Ainsi par exemple, dans une parcelle érosive, travailler sur une préparation du lit de semence suffisamment motteuse, casser rapidement une croute de battance lorsque celle-ci se forme ou encore aménager les bords de champs seront des solutions efficaces. Collectivement, l’utilisation de buses anti-dérives à basse pression et le maintien des distances réglementaires vis-à-vis des fossés et cours d’eau sont également incontournables pour limiter les risques de transferts aériens. Sur le Chifrouët, l’investissement d'agriculteurs, ainsi que celui de techniciens cultures de ce territoire (coopératives, négoces, prestataires de conseils indépendants) d’ETA et de Cuma, ont permis d’avoir en 2020 des résultats de qualité de l'eau, qui malgré des risques accrus de transfert d’herbicides du fait d’une surface en maïs plus importante, se sont maintenus à des niveaux encourageants :
-17 % de matières actives à l'hectare ;
+124 ha de maïs avec du désherbage mécanique ;
la mise en place de premiers aménagements de bords de champs.
Le plus complexe consiste à choisir les solutions les plus pertinentes à mettre en œuvre dans les parcelles ou le siège d’exploitation. Des aides existent aujourd’hui sur une majorité du territoire breton (financements PCAEA pour le matériel, aide MAE pour les changements de système, aide à l’aménagement de votre collectivité…) complétant ainsi la stratégie.
(1) Projet sous maîtrise d'ouvrage de Lamballe Terre et Mer, co-financés par l'Agence de l'eau Loire Bretagne, le Département des Côtes d'Armor et la Région Bretagne.
(2) gMA/ha : gramme de matière active par hectare appelé également quantité de substance active (QSA) en g/ha.