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Marchés agricoles et loi Egalim 2 au menu des discussions

Les chambres d’agriculture de Bretagne ont organisé leurs réunions économiques départementales en ce mois de juin. Un point a été réalisé sur les installations et les transmissions en Bretagne. Puis, les 160 participants ont échangé sur l’actualité économique des filières agricoles et agroalimentaires avant de se pencher sur la proposition parlementaire de loi Egalim 2.

Au menu de l’actualité des filières agricoles et agroalimentaires bretonnes, la crise Covid continue de figurer en bonne place. Cependant, d’autres sujets, parfois encore plus prégnants pour certaines filières, s’ajoutent à la liste. Ainsi, l’inflation du prix de l’alimentation animale figure désormais au sommet des préoccupations pour l’ensemble des éleveurs et plus particulièrement de granivores.

 

Pas de baisse du prix des céréales en vue

Les cours des céréales ont poursuivi leur ascension entamée l’été dernier. Le blé s’échange à 216 €/tonne début juin sur Euronext. Le maïs atteint un plus haut niveau depuis 13 ans à 269 €/tonne fin mai. Même si le prix du tourteau de soja connaît une accalmie, le prix de l’aliment pour bétail s’envole. Que l’on en juge : l’aliment pour vaches laitières atteint son plus haut niveau depuis 15 ans. Celui pour volaille s’envole de 25 % par rapport à 2020. En porc, le prix moyen de l’aliment approche les 280 €/tonne en avril contre 245 €/tonne l’année dernière. Une certaine stabilisation semble s’opérer. Mais les projections de stocks mondiaux de grains réalisés par le CIC laissent à penser que les prix pourraient rester élevés : ces stocks devraient baisser en 2021/22 pour la 4e année consécutive à 595 millions de tonnes, au plus bas depuis sept ans.

Il y a 742 000 vaches laitières en avril 2021 en Bretagne contre plus de 775 000 il y a deux ans.

La volaille particulièrement chahutée

Déjà affectée par la hausse de l’aliment, la volaille bretonne a dû faire face à la fois à l’épidémie d’influenza aviaire et aux conséquences de la crise du Covid-19. La Bretagne étant très orientée vers les marchés de restauration hors domicile, elle est particulièrement pénalisée par le contexte actuel. Les abattages bretons de volaille baissent de 6,1 % au premier trimestre 2021 par rapport à 2020. En première ligne face à cette crise, le canard continue d’être l’espèce qui en fait le plus les frais. Leurs abattages sont en retrait de 11 % au premier trimestre 2021. Autre production particulièrement affectée par la fermeture des restaurants, le veau de boucherie voit une stabilisation de ses cotations au prix d’une très forte réduction des mises en place. Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, la santé de ces secteurs dépendra de l’évolution des restrictions qui touchent la restauration.
À l’inverse de la volaille, la viande bovine, et particulièrement les vaches allaitantes, bénéficie de ce contexte très particulier : la renationalisation de la consommation soutient la demande en viande française et les marchés européens se raffermissent.
Enfin, le marché du lait est assez épargné par la crise du Covid. L’élé-ment qui retient plus l’attention concerne l’évolution des effectifs de vaches laitières en Bretagne. Ils sont en baisse continue depuis deux ans. Il y a 742 000 vaches laitières en avril 2021 en Bretagne contre plus de 775 000 il y a deux ans. Si cela ne se matérialise pas encore par des baisses notables de volume de lait, cette décapitalisation est un signal d’alerte.
L’actualité des marchés est donc riche et influe largement sur les prix payés aux producteurs. Ces réunions économiques ont cependant aussi été l’occasion de se pencher sur la proposition parlementaire de la loi Egalim 2 qui porte l’ambition de "protéger la rémunération des agriculteurs". Et d’abord de faire un bilan de la loi Egalim 1.

Marchés agricoles et loi Egalim 2

Egalim 2 : bis repetita ou réussite ?

Qui dit Egalim 2 sous-entend qu’Egalim 1 n’a pas tenu toutes ses promesses. Cette loi, entrée en vigueur en octobre 2018, comportait en effet déjà dans ses objectifs l’amélioration des revenus des agriculteurs. Force est de constater que le résultat n’est pas à la hauteur des espoirs. Plusieurs raisons expliquent cela. D’abord, cette loi s’applique principalement aux relations entre les grandes et moyennes surfaces (GMS) d’un côté et les industriels de l’autre. Or, les GMS ne représentent qu’une partie des débouchés des produits agricoles français. En lait et viande bovine par exemple, c’est l’équivalent de 40 % de la production française. S’ajoute le fait que les marques de distributeurs ne sont pas incluses dans le périmètre de la loi pour des raisons juridiques.
Plus fondamentalement, l’obligation faite aux GMS d’augmenter leurs marges sur certains produits pour que les bénéfices engendrés "ruissellent" vers les producteurs ne fonctionne pas. Face à cet échec, quelles sont les nouvelles dispositions actuellement discutées par l’Assemblée nationale ? Parmi les deux plus importantes, on relève la proposition de généraliser les contrats écrits et pluriannuels en matière de contrats de vente de produits agricoles entre un producteur et son premier acheteur. Le texte propose aussi de sanctuariser le coût d’achat de la matière première agricole et renforce sa transparence. Est-ce que cette dernière mesure va vraiment s’appliquer ?
On constate que la loi Egalim régit et s’insinue toujours plus loin dans la relation entre GMS et fournisseurs jusqu’à par exemple prévoir qu’une autorité administrative compétente soit seule habilitée à autoriser certaines publicités. Pourquoi ne pas directement obliger par la loi que les produits agricoles soient achetés à leur coût de production ? Simplement parce que cela irait à l’encontre des règles européennes de libre concurrence. Le législateur français semble donc contraint d’empiler des dispositifs toujours plus nombreux pour réguler les relations entre maillons de la filière, sans pour autant de garantie que l’objectif initial puisse être atteint.

 

Ils ont dit

Paul Auffray (chambre d'agriculture des Côtes d'Armor) / Le contexte exceptionnel que nous vivons au travers de la situation sanitaire en France et partout dans le monde, doit nous permettre de renforcer et d’afficher notre ambition agricole pour la Bretagne ! Et aussi de renforcer notre politique de renouvellement des générations et la vocation de polyculture-élevage de notre région. Dans un contexte de hausse des prix des intrants sans répercussions systématiques aux prix payés aux producteurs, la loi Egalim 2 montrera son efficacité si elle permet de redonner du prix, du revenu et donc des perspectives aux agriculteurs.

Jean-Hervé Caugant (chambre d'agriculture du Finistère) / Dans la continuité du dispositif d’installation, nos conseillers restent proches du chef d’entreprise pendant les premières années. Ce suivi post-installation est primordial pour sécuriser le projet. Les résultats sont probants : la pérennité des installations aidées à quatre ans est de 97 % en Bretagne ! Il ne faut pas non plus négliger la transmission : ce passage de relai s’anticipe et se prépare. Le RDI (Répertoire départ installation) est là pour vous accompagner ! En 2020, il a rendu possible 96 installations en Bretagne.

Loïc Guines (chambre d'agriculture d'Ille-et-Vilaine) / En moyenne, sur les quatre dernières années, 465 agriculteurs par an se sont installés en Bretagne : le métier attire ! De nombreux agriculteurs se trouvent bien dans leur métier, bien dans leur tête et bien dans leurs bottes, dès lors que leur système de production est cohérent, adapté à leurs envies et à leur état d’esprit. C’est là la clé pour éviter l’usure du métier : des projets bien ficelés, à la fois sur la rentabilité économique et sur la charge de travail et son organisation.

Laurent Kerlir (chambre d'agriculture du Morbihan) / La loi Egalim, promulguée en octobre 2018, n’a pas atteint ses objectifs de sécurisation des revenus des agriculteurs. En partie parce qu’elle ne s’applique qu’aux grandes et moyennes surfaces, qui ne représentent pas l’ensemble des débouchés de nos productions, mais aussi parce que les marques de distributeurs n’entraient pas dans son champ d’action. La proposition parlementaire de loi Egalim 2 doit permettre de remédier à cette lacune.

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