Un espace test pour conforter ou amender son projet d’installation
L’espace test permet aux futurs agriculteurs d’expérimenter grandeur nature leur projet d’installation, histoire de le conforter, l’amender voire l’abandonner. À Ménez Meur, à Hanvec (Finistère), le parc naturel régional d’Armorique, vient ainsi de mettre le pied à l’étrier à Sandrine Le Pinsec et Arnaud Dispagne.

"Petits, petits...". En ce brumeux matin d’hiver, en plein coeur des Monts d'Arrée, quelques brebis, plus curieuses que leurs congénères, viennent jusqu’au grillage voir qui les appelle. "Ce sont les meneuses, indique Sandrine Le Pinsec. Elles font venir le reste du troupeau". Voilà 13 ans déjà que la bergère a entamé une reconversion professionnelle, après avoir travaillé d’abord dans le milieu hospitalier. Et après avoir "baroudé pas mal" et gardé des troupeaux transhumants un peu partout dans les montagnes françaises, l’envie lui a pris de s’installer à son tour. "Mais j’ai du mal à franchir le pas : investir me fait peur". C’est donc sans hésiter qu’elle a postulé au parc de Ménez Meur, à Hanvec, où le PNRA, le parc naturel régional d’Armorique vient de mettre en place un espace test.
Favoriser l'installation
Comme son nom l’indique, l’espace test permet de tester son projet d’installation, en mettant à disposition foncier, moyens de production… Une cinquantaine fonctionnent actuellement en France, dont 6 seulement en élevage. "À Ménez Meur, le projet est né d’une volonté forte du PNRA de soutenir une agriculture durable, qui préserve les ressources de son territoire", détaille Solène Larzul, chargée de missions développement agricole et alimentaire au PNRA et coordinatrice de l’espace test. Mais le renouvellement des générations est loin d’être assuré. "Aujourd’hui, un chef d’exploitation sur deux a plus de 50 ans. Il n’y a, en moyenne, qu’une installation pour trois départs. Et le profil des candidats à l’installation a beaucoup changé : un sur trois est non issu du milieu agricole. Et beaucoup, en reconversion professionnelle, ont de petits projets, à forte valeur ajoutée du fait de la transformation et de la vente en circuits courts".

Expérimenter leur projet
Pour les aider à franchir le pas, le PNRA a décidé de mettre en place un espace test, en mettant à leur disposition foncier, bâtiments, matériel... pour une durée déterminée. "Sur une année, renouvelable au maximum deux fois, il leur permet d’expérimenter leur projet, de le conforter, l’ajuster voire l’abandonner". Une liberté que Sandrine Le Pinsec apprécie. "Il me faut monter mon cheptel, trouver un boucher agréé bio pour découper mes animaux, et des débouchés, alors que les Bretons n’ont pas une culture à manger de l’agneau".
Démarrer la commercialisation
"L’espace test donne un cadre légal au porteur de projets", détaille Solène Larzul. La CAE, la coopérative d’activités et d’emploi Chrysalide, assure à la fois hébergement juridique et appui entrepreneurial, administratif et comptable. Le porteur de projets peut ainsi produire et commercialiser sans être considéré comme agriculteur, ce qui lui permettra ensuite de bénéficier des aides à l’installation.
De nombreux partenariats ont été noués avec la chambre d’agriculture, le Gab, le Civam, la fédération des races de Bretagne… pour un accompagnement technique, une aide à la gestion, à la réalisation de l’étude prévisionnelle… "Une banque d'entraide a été montée avec les salariés de la ferme de Ménez Meur. Et nous aidons aussi les porteurs de projets à s’intégrer dans le territoire". Un appui précieux au moment de chercher du foncier. "J’aimerais bien rester dans le coin, indique Sandrine Le Pinsec. Mais, pour le moment, je n’ai rien trouvé". Souhaitant monter à un troupeau de 150 mères, elle aurait besoin d’une quarantaine d’hectares, mais avec très peu de bâtiments. Et c’est aussi l’espace test qui l’aide à se faire connaître. "Je m’en faisais toute une montagne. Mais bien conseillée, j’ai réussi à trouver une marque, L’agneau d’à côté, monter un site internet et à imaginer des flyers pour vendre mes animaux".
Poules et abeilles
Ingénieur eau et pollutions, Arnaud Dispagne, 36 ans, a lui aussi, fait le choix d’une reconversion professionnelle, optant pour 200 poules pondeuses et quelques ruches, le temps de se faire la main. Et déjà les premières interrogations se font jour. "J’ai choisi une race de pondeuses. Mais je réfléchis à des races anciennes, plus mixtes chair-ponte, qui me permettraient d’élever coqs et poules. Voire de ne partir qu’en chair, l’oeuf bio étant actuellement en crise". Des options que l’espace test lui permettra d'essayer sans prise de risques, avant de se lancer. "Et un stage auprès d’un apiculteur de Plouyé m’a conforté dans la production de miel bio". Reste maintenant à augmenter tranquillement le nombre de ruches.