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Canettes tueuses, quand l'incivilité tue

Depuis deux ans, le Gaec de Kerforn, à Caudan, a du se résoudre à faire euthanasier six vaches sur la centaine de laitières qui apportent, sur 107 ha, leurs 940 000 litres de lait aux trois associés. En cause, l’ingestion avec l’ensilage issu de leur méteil, de débris de canettes de boissons. Jetées depuis la route, elles atterrissent dans leur champ. Quand l’incivilité tue.

Le seau avec la récolte de la veille : des canettes vides de leurs diverses boissons.

Kerforn, Caudan (56), mardi 25 août : Gérard Talvas, associé avec son frère Marcel et son fils Benjamin, exhibe le seau avec la récolte de la veille : des canettes vides de leurs diverses boissons. Le ramassage est plus fourni en fin de semaine. Car la route qui traverse le hameau, en rase campagne, dessert l’un des accès la commune d’Inzinzach-Lochrist. "C’est devenu une cité dortoir", située en deuxième couronne de l’agglomération Lorientaise. Un axe très emprunté et avec lui, son lot d’incivilités : bouteilles, canettes, plastiques et autres déchets lancés par les vitres qui atterrissent dans les champs… Résultats ? "On en retrouve haché dans l’ensilage d’herbe que nous distribuons à nos vaches et ça les tue". Pour preuve, au creux de sa main, les débris déchiquetés de canettes, piquants, coupants, perforants...

Canettes tueuses

Indétectables canettes tueuses

"On en trouve parfois le matin dans les refus. Ce qu’on retrouve, ce sont les plus gros morceaux. Les plus petits, malheureusement, nos animaux les ont ingéré et ils s’empoisonnent", déplore Gérard Talvas. "Notre voisin fait des légumes. Chez lui, c’est une benne complète qui a été saisie à cause d’une bouteille en verre", rapporte l’éleveur qui n’est pas le seul concerné. Reste qu’en moins de deux ans, les associés ont du se résoudre à voir partir à l’abattoir six de leurs bêtes. "Et pas les plus mauvaises", constate Benjamin qui vient de les rejoindre dans cette association. "C’est récurrent, nous avons perdu quatre vaches de manière rapprochée, l’an passé, et deux cette année. Cet été, c’est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase ! ". Fin juillet, après avoir été vue une nouvelle fois par le vétérinaire, la vache traitée, agonisante, "est partie chez Bigard. Saisie totale. Ça fait mal au cœur. On n’élève pas nos animaux pour les voir dépérir, souffrir et mourir comme ça". Plus d’appétit, dépérissement..."C’est à chaque fois la même chose, le véto vient, les traite, met des aimants pour tenter de capter les éventuels morceaux mais pour l’essentiel, certaines de ces canettes de boisson sont en alliage non-ferreux, donc on ne trouve rien". Ni les aimants du vétérinaire, ni l’électro-aimant en tête de l’ensileuse de l’entreprise chargée des travaux ne parviennent à les capter. Au final, quelques contenants en aluminium se retrouvent hachés et les morceaux, brassés dans l’ensilage, sont distribués à l’auge. Si pour certaines, les débris sont évacués, pour d’autres laitières, "c’est un piège", mortel.

La canette, c'est un piège, mortel.

Alerter

Les éleveurs ont donc décidé d’alerter sur ces empoisonnements. "Les fabricants du machinisme agricole devraient se pencher sur la question mais également les industriels de la canette et des boissons pour faire des alliages détectables", suggèrent ces éleveurs qui souhaitent aussi alerter le grand-public pour faire passer "le message du risque que font encourir à nos animaux des gestes plein d’inconséquences". Et pour ces membres de Res’agri, impliqués dans des groupes notamment sur l’autonomie protéique : "on se pose beaucoup de questions. Nous avons voulu faire évoluer notre système, faire les choses bien, en augmentant nos surfaces en herbe et en méteil. Les sols sont mieux, c’est moins d’intrants… C’est très intéressant en valeurs protéiques et c’est donc devenu la base de la ration", détaille-t-il de la conduite alimentaire du Gaec. Mais voilà, fauché bas par l’ensileuse, le méteil peut contenir ces cannettes qui se retrouvent au sol, contrairement au "maïs ensilé plus haut". Et ce n’est pas de gaité de cœur que ces éleveurs envisagent d’augmenter la part du maïs dans la ration. "Mais si si on ne trouve pas de solution, on ne va pas continuer à exposer nos vaches !". Car il y a préjudice financier, "1 500 euros pour une vache perdue sans compter les 2 000 euros de perte laitière, les coûts vétérinaires…". Pour s’en prémunir les associés viennent de contracter une assurance "mortalité". S'y ajoute "le préjudice moral. On les aime bien nos vaches. Les voir partir comme ça, c’est choquant !".

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