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Convention citoyenne pour le climat : un projet agricole se dessine

En fonctionnement depuis octobre, la Convention citoyenne sur le climat, issue du Grand débat national, est constituée de cinq groupes thématiques. Le groupe "Se nourrir" doit définir la façon dont le secteur agricole et agroalimentaire français pourra réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % à l’horizon 2030. À l’issue de trois sessions de travail, les contours de ce projet se dessinent.

Les principaux axes de réflexion du groupe à ce stade : limiter le gaspillage, mieux informer les consommateurs, ou relocaliser l’alimentation.
© J. Joka

"Au début, j’étais plutôt intéressé par le groupe Se déplacer", confie Guy, retraité de la Haute-Vienne. Désigné par tirage au sort pour participer au groupe "Se nourrir" de la Convention citoyenne sur le climat, comme 29 autres citoyens, Guy s’intéressait peu à l’alimentation. Les transports et le logement avaient, comme pour lui, les faveurs de nombreux autres de ses collègues, a-t-il constaté à l’issue de la première session de la Convention, le 4 octobre. "Une partie des gens n’appréhendait pas du tout ces sujets-là, une autre partie n’était pas convaincue. Mais au cours des sessions, ils sont arrivés à un niveau de connaissance qui leur permet de partager la même vision des enjeux", se félicite Marie Casanelles, l’une des animatrices du groupe se Nourrir, consultante chez Respublica. La seconde session, du 25 au 27 octobre, a permis justement d’engranger des connaissances, avec un panel réunissant Greenpeace, l’Iddri*, la FNSEA, la FNH et Système U. Si les participants ont pu donner des idées concernant les experts à solliciter, le Cese (Conseil économique, social et environnemental), organisateur de la Convention, avait lancé lui aussi ses propres invitations. "On imagine qu’ils doivent respecter une certaine impartialité. L’Iddri, par exemple, n’était venu à l’idée de personne dans le groupe", souligne Guy.

 

Les inspirations de la Convention

En tous les cas, la présentation de l’Iddri, un think-tank expert du développement durable, semble avoir marqué les membres du groupe, comme Guy, mais aussi Gregory, autre membre du groupe Se Nourrir, et électricien à Rennes : "Leur projet nous a vraiment séduits, c’est une base de travail pour nous. Laure Ducos aussi, de Greenpeace, a été un moteur".

"J’ai essayé de montrer ce qu’on avait essayé de faire avec la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), et pourquoi les objectifs intermédiaires n’avaient pas été atteints", précise Sébastien Treyer, directeur général de l’Iddri. À lire les principaux axes de réflexion du groupe "Se nourrir", publiés à l’issue de la session, de nombreuses propositions, quoique vagues à ce stade, font en effet écho au volet demande ali-mentaire de la SNBC, comme à la loi Egalim : limiter le gaspillage, mieux informer les consommateurs, ou relocaliser l’alimentation.

L’autre volet important de la future copie du groupe sera de "réformer la PAC", comme le décrit laconiquement un compte-rendu. La dépendance de l’agriculture française à des importations responsables de la déforestation au Brésil pose notamment, comme le rappelle Sébastien Treyer, "une énorme question de mise en œuvre, pour savoir comment rediversifier nos paysages agricoles, en remontant de véritables filières pour les protéagineux". Un problème qui pourrait être résolu par une refonte du système d’aide, mais sur lequel les experts, pour l’heure, n’ont pas apporté de solution concrète au groupe.

Un comité d'experts analysera les propositions vis-à-vis de leur coût, de leur faisabilité concrête, et de leur impact en termes de gaz à effet de serre

 

Déjà des inquiétudes

Comme beaucoup de ses collègues, Guy poursuit le travail entre les sessions, en allant à la rencontre de producteurs, des chambres d’agriculture ou même d’élus, pour améliorer le projet de la convention, mais aussi pour commencer à le défendre. "Si on nous demande de faire des propositions, et que les députés n’en tiennent pas compte, ça ne sert à rien qu’on se casse la tête. On a tous peur que la convention ait été prétextée seulement pour remettre en place la taxe carbone", s’inquiète Guy. D’après les engagements du Président de la République, les propositions de la convention seront soumises "sans filtre", au référendum, au vote du Parlement, ou à une application réglementaire directe. Un tri aura pourtant bien lieu, mais en amont. "Un comité d’experts analysera les propositions vis-à-vis de leur coût, de leur faisabilité concrète, et de leur impact en termes de gaz à effet de serre. Un groupe d’experts juridique travaillera également à la cohérence des mesures", précise Agnès Casado, autre animatrice du groupe "Se nourrir", manager chez Eurogroup consulting.

En raison des manifestations, la session 4 a été annulée, et la prochaine session aura lieu le 10 janvier. Lors de ces prochains rendez-vous, les citoyens conduiront moins d’entretiens, pour mieux plancher sur leurs propositions, en vue de rendre une copie détaillée à la fin du mois de janvier. "Ce qui me guide, c’est l’intérêt de la filière. On ne peut pas laisser les agriculteurs se débrouiller dans la transition écologique, il leur faut un support", insiste Guy. Si le bilan politique de l’opération demeure incertain, son intérêt pour la construction d’une nouvelle forme de citoyenneté semble, lui, déjà acquis.

* Institut du développement durable et des relations internationales

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