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Un milliard de litres de lait bio à l’horizon 2020

Indéniablement, le marché du lait bio poursuit sa croissance. Malgré une stagnation de la collecte en 2019, celle-ci devrait dépasser le milliard de litres au premier semestre 2020. Une après-midi entière était consacrée à l’avenir du lait bio au Space.

Space 2019
Si la collecte a connu une hausse de 30 % en 2018, elle serait encore de 15 % en 2019.
© Claire Le Clève

La collecte laitière bio a "changé de dimension", selon les termes de Benoît Baron, de l’Institut de l’élevage (Idele). Multipliée par 2,5 depuis 2011, elle a connu une croissance de plus de 200 000 litres en 2018. Elle représente 3,5 à 4 % de la collecte française totale réalisée par 3 400 producteurs (soit 6 % des producteurs de lait). L’explosion de la collecte de 2018 est expliquée par une forte vague de conversions en 2016. Si la collecte a connu une hausse de 30 % en 2018, elle serait encore de 15 % en 2019. L’interprofession a analysé la part de cessation (retour en conventionnel ou cessation d’activité), elle est constante, de 0,5 % environ chaque année, ce qui marque un dynamisme réel et continu de la filière.

 

Une collecte qui doit síajuster

Le niveau de conversions est en baisse sur le premier semestre 2019, "mais toujours dans les standards élevés", selon Benoît Baron. Autre cause de la baisse de collecte cette année : la sécheresse. La collecte reste toutefois dynamique sur le premier semestre. Selon les résultats de l’enquête menée par l'interprofession (Cniel) auprès des laiteries, le milliard de litres de lait bio devrait être dépassé au premier semestre 2020. Pour Antoine Auvray, de l’interprofession laitière, le plus important est de ne pas déconnecter l’offre de la demande. "Il faut être vigilant sur l’équilibre entre l’offre et la demande. La moindre hausse de l’offre peut affecter les prix".

 

Les GMS, poids lourds du bio

Du côté de la demande, le marché des produits bio a quadruplé en dix ans, atteignant 9 694 milliards d’euros en 2018. L’enquête de l’Agence bio démontre que les grandes et moyennes surfaces (GMS) engrangent la plus grande part de cette évolution. Celles-ci représentent 49 % des ventes de produits bio en 2018. Selon la technicienne de l’Agence Bio, Eva Lacarce, la forte hausse résulte du "développement du linéaire bio en GMS et l’importante diversification des gammes que les magasins ont su mettre en avant".

L’Agence souligne aussi l’effort des industriels : "Ils ont su s’adapter aux exigences de la bio et au besoin de diversification, mais aussi s’organiser pour l’approvisionnement". L’arrivée des majors laitiers nationaux a pesé dans cette diversification, comme le souligne Benoît Baron de l’Idele : la Vache qui rit bio, les yaourts bio de Danone ; ils offrent un équivalent bio à leur offre traditionnelle. Les GMS représentent 62 % de l’achat des produits laitiers et 82 % du lait.

Les ventes sont en progression constante dans l’ensemble des catégories de produits laitiers bio et dans l’ensemble des magasins.

 

Des perspectives

L’ambition de la loi agriculture et alimentation (Egalim) de proposer 20 % de bio dans la restauration collective d’ici 2022, offre aussi un potentiel de développement dans la restauration hors-domicile (écoles, hôpitaux, maisons de retraite).

Par ailleurs, la moitié des volumes est représentée par le lait liquide et le beurre, ce qui laisse une marge de progrès pour les autres segments (ultra-frais, fromage). Pour Ludovic Billard, président de Biolait, le fromage offre un réel potentiel (le fromage bio représentant aujourd'hui à peine 1,5 % du marché fromager global). Pour Bruno Martel, administrateur d'Agrial, des débouchés inédits pourraient également apparaître : le chocolat, la biscuiterie.

 

Faut-il craindre la segmentation ?

Les laits segmentés (de montagne, de foin etc.) entrent directement en concurrence avec le lait bio. Pour Christophe Audoin, directeur des Prés rient bio (Les 2 vaches), "il faut se réjouir des approches concurrentes, car le consommateur fait un chemin vers plus d’exigence et donc vers le bio".  Il estime qu' "on a la chance d’avoir des distributeurs qui construisent des vraies logiques d’enseignes sur le bio avec des offres pointues. Tant qu’on les a, c’est bon signe pour se développer, les autres offres alternatives ne les ont pas". Mais pour se démarquer, les produits laitiers bio doivent-ils arborer les mentions "sans OGM" ou "lait bio de pâturage" ? Au risque de "perdre le consommateur", craint Yannick Auffret, co-président de la commission lait bio de l’entreprise bretonne Sill.

Pour le producteur breton Bruno Martel, le combat est cependant ailleurs : "Il faut re-sécuriser le consommateur sur les pratiques de la bio : vie de la terre, bien-être animal, empreinte carbone, climat, etc. À un moment ou un autre, on va devoir rendre des comptes". L’éleveur craint une levée de bouclier contre la bio si elle ne sait pas communiquer. Cela passe par une communication directe avec le consommateur, via les réseaux sociaux et les portes ouvertes.

 

Space 2019

La Bretagne, première région de lait bio

La ferme laitière bio n’a pas tout-à-fait le même visage que la ferme dite conventionnelle : plus petite (une moyenne de 60 vaches), moins productive, elle grandit aussi moins vite. L’Idele relève que les fermes se concentrent dans les régions où la bio est déjà bien implantée : en Bretagne, première région de lait bio. Bruno Martel, administrateur d’Agrial, l’explique par la forte présence de groupes bio structurés sur le terrain. "La conversion pose des questions pratiques. On trouve les solutions en allant voir ce qui se fait ailleurs". La fin des conversions de masse en agriculture biologique laisse penser que l’on arrive à un seuil de conversions. La question du renouvellement des générations est aussi cruciale, car la plupart des conversions se sont faites sur le tard.

 

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2 questions à... Ludovic Billard, président de Biolait

Éleveur dans les Côtes d’Armor, Ludovic Billard, est président de Biolait, le principal collecteur de lait biologique (30 % de la collecte de lait bio en France).

Il y a eu des craintes de surproduction début 2019 : lesquelles et comment Biolait y a fait face ?

La croissance de la bio se fait par à-coups. On avait décidé, il y a trois ans, de baisser le volume de production en cas de risque. C’est ce que nous avons fait cette année. Cela nous a permis de beaucoup moins déclasser au printemps.

Est-on à un moment charnière dans le bio et notamment le lait bio : la relative stagnation de la collecte en 2019, les records de consommation de 2018, font-ils penser que l’on parvient à un palier ?

Concernant la collecte, on est à un moment où ça se calme sérieusement en matière de conversions. Il n’empêche qu’un potentiel existe, même s’il reste incertain. Cela a toujours été le cas dans le bio. Mais ça risque d’être plus difficile parce que l’écart technique entre les conduites conventionnelles et bio s’agrandit. Les conversions seront plus compliquées. L’avenir se situe peut-être du côté des jeunes. De nombreux candidats veulent s’installer en bio. Du côté de la consommation, on a connu une croissance de l’ordre de 15 à 20 %. Mais le bio ne représente que 4 % de la consommation globale. On a largement de quoi doubler ce chiffre, a minima. L’augmentation de 32 % de lait de 2018 a été absorbée, celle de 15 % de 2019 va être absorbée aussi. Il me semble qu’on risque plus un manque de lait qu’un surplus à l’avenir.

 

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