La station de Crécom est à un tournant
Avec la fermeture de la station expérimentale porcine de Guernévez, les essais porcins des chambres d'agriculture de Bretagne se concentrent sur le site de Crécom, à Saint-Nicolas-du-Pélem en Côtes d'Armor. Les installations sont en cours d'évolution afin de répondre aux enjeux cruciaux demandés par la société. Le point avec Bertrand Le Bris, responsable du site expérimental.

Quelles sont les nouvelles missions auxquelles la station doit répondre ?
Bertrand Le Bris. Notre mission est de répondre aux attentes sociétales avec pour priorité des travaux sur les thèmes du bien-être et de la santé. Avant à Crécom, l'expérimentation portait sur l'alimentation et la conduite d'élevage avec la comparaison entre la litière et le caillebotis. Même si l'on continue les essais alimentation, l'objectif est de répondre aux attentes sociétales. On essaie d'imaginer quel sera le modèle de porcherie de demain. Sans oublier bien sûr que nous faisons de la recherche appliquée : il faut que les travaux servent aux éleveurs et soient applicables en élevage avec une rentabilité pour l'éleveur. Evidemment cette recherche appliquée est "neutre", avec des travaux exposés et diffusés à tous.
Les installations vont donc être adaptées à moyen terme ?
B.L.B. Dans un premier temps, nous allons transformer 20 cases maternité bloquées en case "truie liberté" d'ici juin 2020 sur la partie caillebotis. Nous installerons un prototype en partenariat avec un équipementier que nous avons élaboré à partir des résultats expérimentaux de la station de Guernévez et des enquêtes en élevages. Ce prototype a été tiré des enseignements sur les différents types de sol, le comportement de l'animal, le matériel... Demain, il faut travailler sur le comportement de la truie et en tirer les enseignements. Par ailleurs, nous mettons en place des groupes de travail avec nos partenaires qui déboucheront en 2022 sur la construction de deux blocs de bâtiments modulables selon les essais : surface par cochon, type de sol, de lumière, de matériaux manipulables, taille de la case, accès extérieur, mode d'alimentation (...), en post-sevrage et en engraissement.
Et aujourd'hui ?
B.L.B. Nous avons arrêté de couper les queues : sur la partie paille, la caudectomie est réglée ! Sur caillebotis, nous démarrons les essais en post-sevrage et engraissement. Nous avons fait venir des matériaux manipulables afin d'évaluer les avantages et les inconvénients. Notre volonté aussi est d'arrêter de meuler les dents mais nous avons été contraints d'arrêter à cause de problèmes sur plusieurs truies d'une même bande. On essaie de mettre en place des conditions plus favorables. Actuellement, nous menons des essais sur la luzerne avec l'appui financier du conseil régional de Bretagne, distribuée en engraissement et gestantes. Mieux vaut étudier cela en station et essuyer les plâtres. La station est bâtie pour cela et le personnel est ouvert à l'étude de pistes novatrices.
Cet élevage est-il un élevagecomme les autres ?
B.L.B. Ici, il y a un très bon sanitaire, et c'est important car les animaux vont extérioriser leur potentiel génétique. Il faut dire que depuis la construction de l'élevage, les salariés changent de tenue à chaque bâtiment. Toute personne qui rentre ne doit pas avoir été dans un élevage 48 heures auparavant et se douche avant d'entrer. Nous avons beaucoup de visites de suivi d'études (chefs de projet, vétérinaires, collègues Anses, Inra, équipementiers, privés...) et les études vont monter en puissance. Sur la partie productions animales, c'est un élevage normal avec une génétique standard et une alimentation classique mais adaptée au potentiel des animaux. À Crécom, nous avons des formules 1 qu'il faut nourrir !
La station est-elle ouverte aux éleveurs ?
B.L.B. C'est une question posée par nos élus. Voir, regarder, mesurer, y-a-t-il un intérêt à entrer dans la porcherie alors que dans le même temps, c'est en contradiction avec nos règles de biosécurité ? Nous réfléchissons au pour et au contre. Aujourd'hui, nous organisons des visites mais uniquement à partir des couloirs vitrés.
Alléger l'enregistrement manuel
Les équipements de mesure et de contrôle se modernisent grâce aux nouvelles technologies. Si les porcs sont équipés de boucle RFID, les bascules sont elles-mêmes dotées de lecteur de boucles : les mesures de poids, très fréquentes, y sont enregistrées, transférées sur smartphone et ordinateur. L'enregistrement des consommations d'électricité et d'eau s'automatise, allégeant les enregistrements manuels. Au 1er semestre 2020, des compteurs d'eau connectés individuels équiperont la maternité.