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L’agriculture Malgache : des marges de progrès conséquentes

Agriculteurs de génération en génération, les paysans malgaches rencontrés, au fil d'un voyage d'étude de quinze jours, ont livré une réalité difficile mais restent empreint d'une volonté indéfectible de développer leurs terres et leurs élevages pour assurer un avenir meilleur à leurs enfants. Dans quel contexte évoluent-ils ? Éléments de réponses.

L'érosion des sols est un phénomène dangereux et rapide. Il y a deux ans, une précédente délégation est passée au même endroit. Il n'y avait qu'un petit fossé. Aujourd'hui, le sol s'est entièrement dérobé, emportant tout sur son passage.
© Hélène Bonneau et Carole Oger

80 % des Malgaches sont agriculteurs et 400 000 installations sont recensées chaque année sur le territoire, soit l’équivalent du nombre de fermes dans l’hexagone. Des chiffres impressionnants vu d’ici, mais qui ne suffisent pas à nourrir la population. "La malnutrition touche entre 60 et 70 % des enfants. Nous encourageons fortement les ménages à s’inspirer du système de polyculture-élevage et à vendre leurs produits au meilleur prix", assure Thierry Dezoumat, directeur du ministère de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche dans la région du Bongolava. Des intentions louables qui font face à une réalité divergente sur le terrain où l’auto-consommation du riz atteint 75 % et où le stockage des céréales est compromis face à une insécurité tenace.

 

Madagascar

Une résilience face à l'adversité

Dans ce contexte, les hommes et femmes, rencontrés au fil du voyage d’étude, ont montré un visage de combativité hors norme et un accueil chaleureux qui laissera des traces auprès de chaque membre de la délégation bretonne. Dans la brousse, à plusieurs heures à pied des infrastructures de la ville, chacun se prend en main. L’enfant en âge de marcher veille sur les plus petits, les travailleurs des champs cultivent leurs parcelles à la bêche quand les anciens organisent la vie du village. Si l’exode rural va bon train - la lumière des villes promettant une vie meilleure - ceux qui restent cherchent à développer leur activité pour subvenir aux besoins de leurs familles. Vianney, jeune agriculteur installé depuis deux ans, revient de la ville. Après des études de droit interrompues pour manque de financement, il décide de revenir au village pour y apporter ses connaissances. Un choix audacieux pour le jeune homme qui décide très vite de travailler avec l’association partenaire d’Afdi Bretagne proposant des conseils en agronomie et en élevage. Si les techniques de travail restent manuelles et que les pratiques ancestrales ont parfois du mal à faire la place à de nouvelles habitudes de travail, tous les groupes engagés avec l'Afdi ont fait progresser leurs rendements. Jusqu'à les doubler avec de nouvelles techniques d'implantation du riz. Des résultats satisfaisants qui font tâche d'huile auprès des membres du village, curieux des résultats prometteurs de la parcelle voisine.

Certains agriculteurs ont doublé leurs rendements de riz grâce aux conseils des techniciens de l'association.

Cultures : un potentiel à valoriser

Les infrastructures électriques, d'eau potable, routières et la sécurité font cruellement défaut aux habitants des villages. Des freins conséquents qui ne permettent pas un développement rapide alors même que le climat, la structure des terres et l'accès à l'eau sont propices aux cultures. À ce jour, majoritairement, les cultures sont réalisées à la pelle, à la bêche et au semis à la volée. Un travail difficile, usant, pour des hommes et des femmes qui peinent à voir des résultats probants. Par ailleurs, certains échanges entres agriculteurs ont surpris la délégation bretonne, notamment sur l'utilisation de la technique de culture itinérante sur brûlis comme moyen de défrichement et de fertilisation. Très souvent utilisés par les propriétaires eux-mêmes ou comme représailles entre bandits et villageois, ces brûlis provoquent une érosion des sols intense. La déforestation du pays et le peu d'arbres et de haies présents autour des parcelles favorisent le phénomène. Cette érosion à grande échelle, pour un pays comme Madagascar, économiquement très dépendant de sa production agricole, est particulièrement problématique. Le partenaire de l'Afdi sur place propose des formations sur les boutures, le greffage, le marcottage pour encourager la plantation d'arbres. Une initiative qui trouve des oreilles attentives notamment auprès de Vincent rencontré lors de la visite du second village qui explique : "je plante des arbres pour que mes petits-enfants puissent en profiter plus tard. J'ai commencé en 2002. Certains font des fruits (mangue, avocat...) et d'autres permettront demain d'utiliser le bois pour faire de la construction". La création de ce verger devient alors une fierté, un moyen de subsistance et de construire son habitat.

 

Madagascar

 

L'élevage : des difficultés substantielles

Les poulets, moutons, cochons et zébus sont les animaux les plus présents dans les villages. Si chaque agriculteur connaît son cheptel, les regards novices peinent à s'y retrouver car les animaux prennent possession de l'ensemble de l'espace public sans signes distinctifs apparents. À l'exception du dernier village visité où les animaux étaient en enclos, tous se baladent parmi la population. Nourris principalement de riz et d'herbes hautes à proximité du village, le cheptel peine à engraisser. Tristan Deslile, producteur de lapins et membre des jeunes agriculteurs des Côtes d'Armor, s'étonnera qu'il faille plus d'un an de plus au lapin malgache pour atteindre les deux kilos et demi qu'à ceux présents dans son élevage.

Même chose pour le cochon, qui lui, accompagne les agriculteurs aux champs, parfois à plusieurs kilomètres, pour éviter de se faire voler. Le vol : une difficulté récurrente pour les éleveurs qui surveillent au plus près leurs animaux. Le vol de zébus est très fréquent et aucun recours ne semble possible auprès des autorités confrontées à la corruption d'une partie de leurs agents.

 

Madagascar

 

Comment l'Afdi travaille dans le Bongolava

L'association de solidarité internationale Afdi (agriculteurs français et développement international) construit des partenariats entre les mondes agricoles français et ceux des pays en développement. Ancrée dans le territoire, elle est composée de professionnels de l’agriculture (agriculteurs, techniciens, cadres), tous membres d’organisations paysannes françaises.
L'APDIP, une structure gérée par ses membres
La structure bretonne de l'Afdi est notamment implantée à Madagascar, dans la région du Bongolava, en partenariat avec une association de terrain : l'Apdip. Créée en 2003, l'association malgache compte 35 groupements et 420 membres et souhaite développer un conseil agricole efficace axé autour de l'agroécologie en vue de favoriser le niveau de vie de ses membres. Toutes les décisions stratégiques sont prises par le conseil d'administration composé de paysans malgaches. L'association propose des services aux adhérents via des ateliers culinaires, la production de semences ou encore la sensibilisation à la vaccination. Outre des solutions techniques, l'Adpid souhaite développer la structuration des paysans via la création de coopératives et des solutions de financement entres agriculteurs.

 

À decouvrir également en vidéos sur www.terra.bzh

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