Maire se conjugue à 84 % au masculin !
Dans quelques jours auront lieu les élections dans les 35 000 communes de France, qui permettront de désigner près de 500 000 conseillers municipaux puis leurs maires. Depuis les dernières élections les règles de parité s'imposent sur la composition des listes dans les communes de plus de 1000 habitants. Une évolution importante qui a fait bouger les lignes au niveau du partage de certaines places, mais pas vraiment en ce qui concerne le partage du "pouvoir", puisque 84 % des maires sont des hommes.

Le site de l'AMF l'association des maires de France regorge de statistiques très précises sur nos élus... et par conséquent sur nos choix et orientations sociétales. Qu'il s'agissse de l'age, de la profession, du sexe, toutes les données sont publiques et accessibles. Qui étaient jusqu'à aujourd'hui nos maires, quelle était leur profession, combien étaient les femmes, la loi qui a introduit la parité dans les communes de plus de 1 000 habitants a-t-elle vraiment changé les choses ? Les chiffres parlent !
Les communes de moins de 500 habitants sont les plus féminisées
L'AMF a comptabilisé, en 2018, 5 900 femmes maires, soit 16,81 % du total (1). Compte tenu de l'obligation de présenter des listes paritaires dans les communes de plus de 1 000 habitants, on pourrait penser que la parité est "à la traine" dans les petites communes souvent rurales..., c'est presque le contraire. Dans les 18 582 communes de moins de 500 habitants(2) le taux de féminisation des maires atteint 17,9 % et 15,4 % dans les 6 872 communes de 500 à 1 000 habitants. À l'autre bout de l'échelle, dans les communes de plus de 100 000 habitants elles sont seulement 14,6 % à être maires (le nombre de communes de plus de 100 000 habitants est de 42). La loi a donc essentiellement fait évoluer le nombre de femmmes dans les conseils municipaux puisqu'elles seraient en 2018 40 % conseillères municipales contre 60 % pour les hommes, mais peu facilité l'accès à la fonction de premier magistrat.
La courbe de la progression de la féminisation de la fonction de maire depuis 1947 parrait presque exponentielle, mais elle plafonne aujourd'hui encore à 16 % ! On peut toutefois imaginer qu'avec plus de femmes dans les conseils municipaux depuis un mandat, elles soient plus nombreuses à vouloir accéder aux fonctions de maire lors des élections de mars prochain..., l'avenir le dira !
Loin de la parité des fonctions
La fonction de maire n'est pas la seule à enregistrer de tels scores de masculinisation. En effet, l'AMF a fait ce même travail au niveau des présidents de Départements ou de Régions. Dans la mesure où la stricte parité est obligatoire pour les élections de conseillers, de conseillers régionaux, la parité est de mise dans les assemblées, mais 90,1 % des présidents de conseils départementaux sont des hommes, 83,3 % pour les conseils régionaux... Chassez le naturel, l'homme revient au galop !
Le haut conseil à l'égalité s'est d'aillers fendu d'un rapport sur l'état des lieux de la parité, avec une conclusion claire, seule la contrainte légale permet le développement d'une réelle parité, mais il y a encore un échelon après : passer de la parité de représentation à parité de fonction. Puis, il restera ensuite encore des marches à franchir pour arriver à une parité de partage des dossiers, le traditionnel social et la culture pour les femmes, et l'économie et la voirie pour les hommes !
L'AMF a fait en ce sens plusieurs propositions, depuis l'établissement d'un scrutin de liste alterné à toutes les communes, l'obligation de réserver le poste de premier adjoint à un candidat de sexe différent de celui du maire, une liste paritaire alternée femme/homme des adjoints au maire. Le sujet de la parité reste donc aujourd'hui totalement un véritable sujet de travail. Les plus impatients diront que la marge de progrès est importante et la vitesse d'avancement faible, les autres trouveront sans doute que ce chantier n'est finalement pas ouvert de façon déterminé depuis aussi longtemps que cela, et que c'est bien au niveau de chaque organisation, chaque structure que la question est posée, et qu'elle doit progresser, mais cela prendra forcément du temps.
Moins d'agriculteurs, beaucoup plus de retraités
L'observation des chiffres statistiques de l'AMF décrit aussi d'autres soucis de parité et de représentativité au niveau des maires. On dit souvent que la profession d'agriculteurs est la plus représentée dans les mairies, mais ce n'est plus le cas depuis très longtemps. En effet, si l'on ajoute dans les statistiques l'ensemble des catégories de retraités, ces derniers sont passés de 30 % en 2001 à plus de 43 % lors du scrutin de 2014. Les agriculteurs ont poursuivi leur lente dégringolade depuis 1995. Bien qu'elle représente moins de 3 % de la population active, la profession "fournissait" encore 13 % des maires en 2014. Les cadres et professions intellectuelles supérieures qui représentaient jusqu'à 22 % des maires ne sont plus aujourd'hui que 12 %. D'une façon générale, la fonction de maire est de moins en moins occupée par des actifs, et plus par des retraités, ce qui répond très probablement au caractère très chronophage de la fonction, on peut imaginer que le scutin de 2020 confortera encore cette tendance. L'age moyen des Maires en 2018 était de 62 ans. Cette évolution sociologique des maires peut aussi être une illustration des difficultés de renouvellement du "personnel politique" au sens noble du terme, mais là aussi, un peu comme au niveau de la parité, la loi peut être un levier. Le monde agricole se pose très souvent la question de la transmission au niveau des élus, cette difficulté à trouver une nouvelle génération de candidats doit interroger chaque citoyen, pour l'avenir.